GENOCIDE PALESTINIEN A GAZA
Par Jawad Kerdoudi
Président de l’IMRI « Institut Marocain des Relations Internationales »
La bande de Gaza vit une situation dramatique. Le 27 Décembre 2008, Israël y a lancé des attaques aériennes faisant 460 morts et plus de 2.000 blessés. Israël a justifié ces attaques par les tirs de roquettes sur le sud de son territoire qui ont fait 4 morts. On voit déjà la disproportion énorme entre les pertes des deux adversaires. Non content de ces résultats, Israël a lancé dans la nuit du 3 Janvier 2009 une offensive terrestre, accompagnée de chars et d’hélicoptères de combat. Le chiffre des morts à Gaza s’élève en 4 Janvier 2009 à 500 morts.
Pour comprendre la situation, il y a lien de revenir sur un bref aperçu historique de la bande de Gaza. Située entre Israël à l’est et l’Egypte au sud, cette bande d’une superficie de 360 km2 est peuplée de 1,5 Million d’habitants avec une des densités les plus fortes du monde : 3800 habitants au km2. Après la guerre israélo-arabe de 1948, cette terre fut occupée par l’Egypte jusqu’en 1967, où elle est tombée sous l’influence israélienne. Israël y a installé 21 colonies, mais a dû la quitter le 17 Août 2005, suite à la résistance et l’opposition farouche des gazaouis. Administrée par l’Autorité palestinienne à partir de 2005, elle tombe sous le contrôle du Hamas le 15 Juin 2007.
Contrairement à ce que prétend l’Occident, le Hamas n’est pas un mouvement terroriste, mais un mouvement de résistance palestinien contre l’occupation israélienne. Fondé en 1987 par le Cheikh Ahmed Yassine, le Hamas avait à l’origine un rôle caritatif et religieux. Au fur et à mesure des années, le Hamas s’est transformé en acteur politique en remportant les élections municipales de 2005 et les législations de 2006. Son leader Ismail Hanyeh fut nommé Premier ministre du gouvernement de coalisation présidé par Mahmoud Abbas appartenant au mouvement Fatah. Par suite de divergences entre le Fatah et le Hamas, et suite à la prise de contrôle de Gaza en Juin 2007 par le Hamas, la rupture fut consommée entre les deux mouvements, et Mahmoud Abbas nomma un nouveau gouvernement dirigé par Salam Fayad. Les divergences entre le Fatah et le Hamas tiennent à l’approche concernant la résolution du conflit israélo-palestinien. Le Fatah qui reconnaît l’Etat d’Israël, est pour une approche négociée, tendant à la création d’un Etat palestinien, et l’arrêt des attentats contre l’Etat hébreu. Le Hamas est beaucoup plus radical, ne reconnaît pas l’Etat d’Israël, refuse de cesser le tir des roquettes sur Israël, et consent au plus à un trêve de longue durée avec Israël, si ce dernier se retire des territoires occupées depuis 1967.
Pour revenir à la situation qui prévaut à Gaza après les attaques israéliennes, on ne peut que déplorer la situation catastrophique qui y règne, avec un grand nombre de morts et de blessés civils, parmi eux des femmes et des enfants. Les chaines de télévision du monde entier montrent des images atroces, et une situation qu’on peut assimiler à un génocide. La bande de Gaza qui subit un blocus depuis Juin 2007, et où l’entrée des journalistes est interdite depuis le 5 Novembre 2008, manque cruellement d’eau, de carburants, de nourriture et de médicaments. La proposition française faite le 31/12/2008 pour un cessez-le-feu humanitaire de 48 heures a été refusée par Israël. Tzipi Livni, ministre des Affaires Etrangères israélienne a eu l’outrecuidance de déclarer à Paris qu’il n’y a pas de crise humanitaire dans la bande de Gaza. Plus grave encore, la présidence tchèque de l’Union européenne a déclaré que l’attaque terrestre israélienne du 3 Janvier 2009 était « défensive » et non offensive.
On ne peut se révolter contre tant d’injustice, avec la complicité de l’Occident, et surtout des Etats-Unis, qui ont mis leur véto à une résolution libyenne à l’ONU pour un cessez-le-feu immédiat. Or le problème israélo-palestinien est éminemment politique. Pendant un demi-siècle les guerres se sont succédés dans cette région sans aucun résultat. Le conflit est né de l’instauration de l’Etat d’Israël en 1948 sur une terre arabe. Israël doit comprendre que pour vivre dans la région, il doit faire la paix avec ses voisins. Israël a déjà fait la paix avec l’Egypte et la Jordanie. L’équation est simple : la terre en échange de la paix. Israël doit rendre le Golan à la Syrie, et négocier sérieusement avec les palestiniens. Au lieu de cela, et après la Conférence d’Annapolis en 2007, Israël a continué à construire le mur de séparation, et à installer de nouvelles colonies en Cisjordanie, et de nouvelles implantations à Jérusalem-Est. Or une paix définitive ne peut s’instaurer dans la région sans des concessions territoriales d’Israël, qui prend prétexte de la radicalité de Hamas pour ne rien faire. Israël a également ses radicaux qui rêvent du « Grand Israël ». Pour faire taire les extrémistes des deux bords, il faut des concessions des deux parties. Il est certain qu’un accord raisonnable peut emporter le pari de la paix.
L’année 2009 débute mal avec cette nouvelle agression israélienne sur la bande de Gaza. D’autres problèmes vont préoccuper les dirigeants de la planète : crise économique et financière, conflits d’Irak et d’Afghanistan, lutte contre le terrorisme international, risques de dissémination nucléaire, gestion des risques climatiques. Mais la résolution de conflit israélo-arabe doit avoir la priorité de la communauté internationale, vu qu’il dure plus d’un demi-siècle. L’Union pour la Méditerranée doit en particulier jouer un rôle primordial dans la résolution de ce problème. Sinon, cette Union échouera comme le Processus de Barcelone. Espérons que l’accession le 20 Janvier 2009 d’Obama à la présidence des Etats-Unis, puisse contribuer efficacement à la solution de ce problème.
CHRONIQUES HEBDOMADAIRES DE l'IMRI