Situation dangereuse au Sahel
Position ambiguë de l’Algérie
Par Jawad Kerdoudi
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)
Le Sahel, c’est cette bande de territoires fermant la frontière entre le domaine saharien au Nord et les savanes du domaine soudanien. S’étendant de l’Atlantique à la Mer rouge, les frontières de cette région sont difficiles à déterminer avec précision. Les pays riverains sont nombreux : Sénégal, Mauritanie, Mali, Algérie, Burkina Faso, Niger, Tchad, Soudan, Cap Vert. Le Maroc est également partie prenante de cette région du fait de ses frontières avec l’Algérie et la Mauritanie. Cette région est en proie à la sécheresse et à la désertification, et la population très faible et pauvre vit principalement de pastoralisme transhumant.
Le Sahel est devenu une véritable poudrière, et le repaire de trafiquants d’armes et de drogues. Le Polisario et l’AQMI y trouvent une source de revenus, et y circulent quasi-librement du fait de la difficulté de contrôler la région efficacement. Les revenus proviennent du trafic d’armes et de drogues, mais aussi des rançons payées à la suite de l’enlèvement d’européens surtout français. L’AQMI (Al Qaida au Maghreb Islamique) était auparavant une organisation islamiste armée d’origine algérienne, et était connue avant le 25 Janvier 2007 sous le nom de GSPC (Groupe Salafiste pour le Prédication et le Combat). Quoique intervenant sporadiquement en Algérie, l’AQMI a étendu sa zone d’opérations dans le Sahel. La situation dans le Sahel s’est aggravée suite à la révolte en Libye, du fait qu’après la chute du régime de Kaddafi, les mercenaires ont reflué dans la région avec des véhicules, des armes et des explosifs.
Devant la situation très dangereuse dans le Sahel, les pays riverains ont essayé de s’organiser pour faire face à la menace de terrorisme sur leur propre territoire. L’Algérie s’est placée en pôle position en organisant deux réunions régionales en Mars 2010 à Alger et Mai 2010 à Bamako. Elle a créé un Centre de renseignements commun à Alger et un Etat- majeur à Tamanrasset. La position de l’Algérie est ambiguë du fait qu’elle a associé à son action uniquement trois pays : le Niger, le Mali et la Mauritanie. Elle a complètement ignoré le Maroc, qui comme déjà dit est partie prenante dans le Sahel. On se rappelle la découverte le 5 Juin 2011 d’un important dépôt d’armes et de munitions à 80 km d’Amgala. Le risque est important pour notre pays, que les mercenaires du Polisario acheminent les armes et munitions du Sahel vers nos Provinces sahariennes.
L’Algérie a récidivé en organisant à Alger les 6 et 7 Septembre 2011 une conférence internationale pour lutter contre le terrorisme et la criminalité, en invitant 4O pays sauf la Libye, le Maroc et la Tunisie. Cette conférence a d’ailleurs eu peu de résultats concrets, puisque l’option d’une opération militaire conjointe des pays riverains du Sahel n’a pas été retenue. La position ambiguë de l’Algérie se reflète également dans son attitude vis-à-vis de la révolte la Libye contre Kaddafi. Non seulement elle n’a pas voté en Mars 2011 la résolution 1973 autorisant l’intervention aérienne de l’OTAN en Libye, mais elle a aidé le dictateur libyen en envoyant des mercenaires du Polisario, et en facilitant le transport de carburant et d’armes d’Algérie vers la Libye. Valeur d’aujourd’hui, l’Algérie n’a pas encore reconnu officiellement le Conseil National Transitoire libyen.
On ne peut que déplorer l’attitude du voisin algérien, car pour lutter efficacement contre le terrorisme en provenance du Sahel, il faut une action globale de tous les pays de la région. La collaboration devrait se faire au niveau du renseignement, très important dans ce genre de situation, et également par des opérations militaires conjointes, pour démontrer la ferme détermination d’en fuir avec le terrorisme dans la région. Puisse l’Algérie réparer cette nouvelle erreur.
CHRONIQUES HEBDOMADAIRES DE l'IMRI