Les élections présidentielles françaises :
Quel impact sur le Maroc ?
Par Jawad Kerdoudi
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)
Conformément à la Constitution française du 4 Octobre 1958, les élections présidentielles françaises se dérouleront le 22 Avril 2012. Si aucun candidat n’obtient une majorité d’au moins 50% des votes, un second tour présidentiel est prévu le 6 Mai 2012. Le Président de la République française est élu au suffrage universel pour un mandat de cinq ans, avec la possibilité de n’exercer que deux mandats consécutifs. Rappelons que la Constitution du 4 Octobre 1958, inspirée du Général De Gaulle, accorde des pouvoirs très importants au Président de la République. C’est ainsi qu’il nomme le Premier ministre, préside le Conseil des ministres, promulgue la loi, peut prendre l’initiative d’un référendum, et dissoudre l’Assemblée nationale. Il signe les ordonnances et décrets délibérés en Conseil des ministres, nomme aux emplois civils et militaires, accrédite les Ambassadeurs, est le chef des Armées, peut exercer dans certains cas des pouvoirs exceptionnels, et dispose du droit de grâce. Les pouvoirs du Président français se sont accrus depuis la réforme en 2000 de la Constitution réduisant le mandat présidentiel de sept à cinq ans. Le Président Sarkozy durant son premier mandat a exercé pleinement les pouvoirs qui lui sont accordés par la Constitution, et s’est révélé sur le plan interne et externe comme le chef de la France.
Pour l’élection présidentielle 2012, dix candidats ont été retenus officiellement par le Conseil constitutionnel. On peut considérer cinq candidats comme marginaux, car les sondages leur accordent entre 0,5% à 3% de votes. Par contre, les sondages accordent 10% et plus à cinq candidats. Il s’agit du Président sortant Nicolas Sarkozy soutenu par l’UMP (Union pour un Mouvement Populaire) qui représente la droite classique. Puis vient ensuite François Hollande représentant le PS (Parti socialiste). Suivent ensuite Marine le Pen du FN (Front National) parti d’extrême droite, puis Jean-Luc Mélenchon du FG (Front de Gauche) représentent l’extrême gauche, et enfin François Bayrou du Modem (Mouvement démocrate) qui est un parti centriste. Le dernier sondage IFOP effectué entre le 3 et 6 Avril 2012 crédite chaque candidat au premier tour des votes suivants : Sarkozy (29%), Hollande (26,5%), Marine le Pen (16,5%), Mélenchon (12,5%) et Bayrou (10%). Quant au second tour le même sondeur crédite François Hollande de 53% et Nicols Sarkozy de 47%.
En ce qui concerne les programmes présentés par les deux principaux candidats, la doctrine de l’UMP déclare qu’il faut laisser " libre cours au destin individuel de la personne qui dépasse le déterminisme social ". D’où une plus grande autonomie aux établissements scolaires, un contrôle plus strict des chômeurs, une modération de la fiscalité, une diminution des effectifs dans l’administration publique, une meilleure gouvernance économique de la zone euro. Le candidat de l’UMP propose également la lutte contre l’immigration clandestine, un contrôle plus strict de l’immigration légale, et un renforcement de la sécurité intérieure. Il est pour le maintien de l’énergie nucléaire, la réduction du déficit de la CNSS, et la fixation de l’âge de la retraite à 62 ans.
Son concurrent du PS a des préoccupations plus humanistes et plaide pour un renforcement du rôle de l’Etat. C’est ainsi qu’il préconise le recrutement de 60.000 postes supplémentaires dans l’éducation en 5 ans, la création de 150.000 emplois jeunes, et d’une banque publique d’investissements pour favoriser en particulier les PME. Il préconise une fiscalité plus lourde pour les nantis, l’encadrement des loyers et des salaires dans les entreprises publiques, le droit de vote aux étrangers pour les élections locales. Il propose de renégocier le Traite européen signé le 9/12/2011 pour mieux favoriser l’emploi et la croissance. Il prévoit également un contrat d’accueil et d’intégration pour les immigrés légaux. L’effectif de l’administration ne sera pas réduit, et le rôle de l’Etat et des services publics renforcé partout sur tout le territoire. Il veut réduire l’énergie nucléaire pour la production d’électricité de 75% actuellement à 50% en 2025. Il veut revenir à la retraite à 60 ans pour ceux qui ont cotisé la totalité de leurs annuités, et a mentionné dans son programme le développement des relations de la France avec la région méditerranéenne.
Les relations entre le Maroc et la France sont très importantes pour des raisons géographiques et historiques. La France est notre premier client et fournisseur, premier investisseur, et premier pourvoyeur de touristes. La plus grande communauté marocaine à l’étranger vit en France, alors que plus d’un millier d’entreprises françaises exercent au Maroc. C’est pour cela qu’on ne peut rester indifférent aux élections présidentielles françaises. Cependant, vu justement les relations très étroites d’Etat à Etat, et l’importance des intérêts économiques et sociaux réciproques, on peut en déduire qu’il n’y aura pas de changement notable de la politique de la France vis-à-vis du Maroc, quelque soit le Président qui sera élu le 6 Mai 2012. Certes, Nicolas Sarkozy connaît bien le Maroc et a entrepris plusieurs voyages dans notre pays. Il a beaucoup encouragé le développement économique du Maroc, et a soutenu sans faille la position du Maroc dans la question du Sahara. De même, Martin Aubry Secrétaire Générale du Parti socialiste a effectué dernièrement un voyage très réussi au Maroc, pendant lequel elle a été reçue par SM le Roi, les partis politiques marocains et la société civile. Il appartiendra à François Hollande s’il est élu, d’effectuer son premier voyage à l’étranger au Maroc, comme le font traditionnellement les dirigeants des pays voisins immédiats.
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