Élections présidentielles américaines
Pour la réélection d’Obama
Par Jawad Kerdoudi
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)
Le 6 Novembre 2012 auront lieu aux Etats-Unis les élections présidentielles. Rappelons que ces élections ont lieu tous les quatre ans correspondant au mandat présidentiel, qui peut être renouvelé une fois. La scène politique américaine est dominée par deux grands partis : le parti démocrate et le parti républicain avec une alternance consécutive aux résultats de l’élection présidentielle. Les deux partis partagent les mêmes valeurs : droits de l’homme, libertés individuelles et collectives, état de droit, libéralisme économique. Ce qui les différencie principalement est une sensibilité sociale plus accentuée, et une politique étrangère plus modérée pour le parti démocrate. A noter également l’importance aux Etats-Unis du pouvoir législatif représenté par la Chambre des Représentants et le Sénat, et qui disposent de pouvoirs très étendus. Le Président démocrate sortant Obama sera confronté au candidat républicain Mitt Romney.
Le bilan du Président Obama est quelque peu mitigé. Certes, des éléments positifs peuvent être inscrit à son crédit. En politique intérieure, il a pu éviter la crise systémique qui allait frapper l’économie américaine suite à la grave crise financière des « Subprimes » de 2008. Par un plan de relance de 750 milliards de $, il a sauvé les banques, ainsi que la grande firme automobile Général Motors. Il s’est battu avec détermination pour l’instauration de l’Assurance-Santé qui va bénéficier à 30 Millions d’Américains qui en étaient dépourvus. Il a continué une politique vigoureuse contre le terrorisme avec notamment l’élimination de Ben Laden en Mai 2011.
En politique étrangère, il a dès le début de son mandat exprimé sa volonté d’insérer les Etats-Unis dans le jeu multilatéral, de contribuer à la paix entre les pays Arabes et Israël, et de lutter contre le réchauffement climatique. Son discours au Caire du 4 Juin 2009 a beaucoup frappé les esprits dans son souhait de mettre fin à la discorde entre les Etats-Unis et le monde musulman. Il a rendu hommage au passé brillant de la civilisation musulmane, et a affirmé son attachement aux principes démocratiques, à la tolérance religieuse et à l’égalité entre les sexes. Il a pratiqué la politique de la main tendue vis-à-vis de l’Iran, de la Russie et de Chine. Vis-à-vis de l’Iran, il s’est opposé aux velléités israéliennes d’attaquer les sites nucléaires iraniens. Vis-à-vis de la Russie, il a signé à Prague en Août 2010 le Traité Start, qui permet l’inspection réciproque des arsenaux. Il a en autre abandonné le projet de « Bouclier antimissiles » en Pologne, et félicité la Russie pour son adhésion à l’OMC. Pour ce qui est de la Chine, il a évoqué au début de son mandat « un partenariat sino-américan », et a déclaré à Tokyo en 2009 que « l’émergence d’une Chine puissante et prospère peut être une force pour le communauté des nations ». Cependant face à la montée du nationalisme chinois et son désir d’expansion en Asie, le Président Obama a décidé le glissement des forces américaines vers l’Océan Pacifique, où à terme 60% de la force navale devrait y être déployée. Il a en outre multiplié et renforcé les militaires au Pacifique, notamment avec le Vietnam et l’Australie. Enfin, il a retiré les troupes américains d’Irak fin 2012, et promis de les retirer d’Afghanistan fin 2014.
Cependant malgré sa bonne volonté et sa détermination, le Président Obama n’a pas réalisé tous ses objectifs. Il a dû subir des attaques personnelles pour sa naissance à l’étranger et sa supposée appartenance à la religion musulmane. Sur le plan le plan politique, il s’est confronté à une opposition virulente du mouvement d’extrême droite « Tea Party », et de la Chambre des Représentants après la victoire républicaine aux élections législatives de 2010. Mais le reproche le plus important qui lui est fait, est la montée du chômage à 8,3% de la population active, soit 15 millions de chômeurs. L’aide gauche de son propre parti a été réticente à la politique d’appui à Wall Street, et lui a reproché de n’avoir pas profité de la crise pour imposer la séparation des activités de banque et d’investissement. Des voix se sont élevées pour regretter l’accentuation de la politique anti-terroriste, la non fermeture de la prison de Guantanamo, la reconduction du Patriot Act, et l’utilisation de drones pour l’attaque de civils en Afghanistan et en Pakistan. En politique étrangère également, peu des résultats concrets ont été atteint. C’est ainsi qu’il n’a pas pu imposer la paix à Israël, et n’a même pas pu obtenir l’arrêt de la colonisation israélienne en Cisjordanie et Jérusalem, du fait de la pression incessante du lobby pro-israélien aux Etats-Unis. La politique de la main tendue vis-à-vis de l’Iran, de la Russie et de la Chine n’a pas eu de grands effets positifs pour l’intérêt des Etats-Unis. La réaction du Président Obama vis-à-vis du Printemps arabe a été tiède en général, et contre-productive pour les cas de Bahreïn et de la Syrie. Enfin malgré le retrait des troupes américaines, la situation est loin d’être stabilisée en Irak et en Afghanistan.
En conclusion, il appartient évidement au Américains d’élire leur nouveau président le 6 Novembre prochain. Mais en tant que pays arabes et musulmans, il est souhaitable que le Président Obama soit réélu. En effet Mitt Romney a déjà manifesté son appui inconditionnel à Israël, et ne fera rien pour la cause palestinienne. De plus, une politique étrangère plus agressive des Etats-Unis sur le plan international peut exacerber les conflits et menacer la paix mondiale, comme par exemple une attaque israélienne contre l’Iran appuyée par les Etats-Unis. Enfin Obama s’il est élu pour un deuxième mandat aura les mains plus libres en politique étrangère, et notamment vis-à-vis du conflit israélo-palestinien.
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