Relations internationales
Rétrospectives 2012 et Perspectives 2013
Par Jawad Kerdoudi
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)
L’année 2012 a été comme la précédente riche en événements qui ont touché les cinq continents de la planète.
En Afrique, ce sont les conséquences du Printemps arabe et la situation au Mali qui retiennent l’attention. Si l’Algérie, le Maroc, et la Mauritanie sont restés relativement stables, la situation en Tunisie, en Egypte et en Libye est des plus préoccupantes. En Tunisie et en Egypte, la victoire des islamistes aux élections législatives et présidentielles s’est accompagnée d’une forte opposition des partis modernistes de gauche et de droite ainsi qu’une partie de la société civile. La Libye reste confrontée à une situation politique instable marquée par le désordre et l’insécurité. Le Mali connaît également une situation des plus dangereuses, après la proclamation le 6 Avril 2012 de l’indépendance du Nord du pays par le Mouvement national de l’Azawad. Les islamistes radicaux ont pris le pouvoir dans cette partie du pays, instaurant la « Chariaa » et détruisant les mausolées religieux. La situation trouble dans la région du Sahel qui profite à l’organisation terroriste AQMI, a retenu l’attention de l’ONU qui a autorisé une intervention militaire armée africaine courant 2013.
Au Moyen-Orient, l’année 2012 n’a guère été plus brillante. Le soulèvement qui s’est déclenché en Mars 2011 en Syrie consécutif au Printemps arabe, s’est transformé en 2012 en guerre civile avec une répression sauvage du gouvernement en place. On compte actuellement près de 45.000 morts et 500.000 réfugiés. La Communauté internationale du fait du blocage de la Russie et de la Chine a été incapable de trouver une solution politique pour arrêter le massacre des civils. De son côté, la Palestine a remporté une victoire en se faisant reconnaître en tant qu’Etat membre Observateur de l’ONU en Novembre 2012. Mais le problème Israélo-Palestinien est loin d’être réglé, du fait de l’intransigeance du gouvernement israélien qui a intensifié la colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. L’Occident (Etats-Unis et Europe) s’est contenté de condamner les actes illégitimes d’Israël, mais sans prendre aucune mesure concrète contre l’Etat hébreu. Le problème du nucléaire iranien et nord-coréen n’a pas trouvé de solution en 2012 malgré l’intensification des sanctions prises contre ces deux pays.
En Europe, l’année 2012 a été surtout marquée par la persistance de la crise économique particulièrement dans la zone Euro, qui a subi un taux de chômage moyen de 11,7% alors que l’Espagne et la Grèce ont dépassé le taux de 25%. La croissance est restée en berne malgré les multiples plans de relance de la Grèce, de l’Espagne et de l’Italie. Le seul élément positif a été l’Accord conclu le 13 Décembre 2012 concernant la supervision des banques européennes. A noter également pendant cette même année, l’élection le 4 Mars 2012 de Vladimir Poutine a la présidence de la Russie, et de François Hollande le 6 Mai 2012 à la présidence de la France. Hollande a été confronté en 2012 à une situation économique très périlleuse, tandis que Poutine n’a manifesté aucune velléité d’assouplissement de son régime autoritaire.
Aux Etats-Unis, le fait marquant a été la réélection à la présidence le 6 Novembre 2012 de Barak Obama après une campagne épuisante et coûteuse, mais qui ne lui a pas accordé la majorité à la toute puissante Chambre des Représentants. La croissance économique américaine s’est un peu améliorée mais le chômage reste élevé. En Asie, la Chine a accédé au rang de deuxième puissance économique mondiale avec un taux de croissance satisfaisant. Cependant aucune réforme politique n’a été entreprise, et le 14 Novembre 2012 a été « élu » Xi Jingine comme Secrétaire Général du parti unique communiste, en attendant d’accéder automatiquement à la présidence de la Chine en Mars 2013. Une lueur d’optimisme est née en Birmanie le 1er Avril 2012 du fait de l’accession au Parlement de l’opposante Sun Kyi, son parti la Ligue nationale de la démocratie a pu accéder au deuxième rang des partis politiques. Au Japon, suite au conflit qui l’a opposé à la Chine concernant les Iles Senkaku et la montée du nationalisme, c’est le parti conservateur PLD de Shinzo Ab qui a gagné les élections le 16 Décembre 2012.
Concernant les perspectives 2013, il est très difficile de faire des prévisions tant l’avenir est incertain. Personne n’avait prévu par exemple le déclenchement du Printemps arabe en 2011. Tout ce qu’on peut espérer, c’est traduire des souhaits. La situation la plus urgente, parce qu’il y a des centaines de morts chaque jour, est la Syrie. Il faudrait obliger Bachar Al Assad à quitter le pouvoir, constituer un gouvernement provisoire, établir une nouvelle Constitution et procéder à des élections législatives et présidentielles. Une deuxième priorité est la situation au Nord du Mali, où il est inacceptable de laisser cette région aux mains des islamistes radicaux et de l’AQMI. Une opération militaire par le CDEAO doit avoir lieu le plus rapidement possible, car toute solution basée sur la négociation avec les rebelles n’est pas crédible. Le Printemps arabe dont les deux objectifs principaux étaient d’instaurer la démocratie et le développement économique et social, a été récupéré par les islamistes en Tunisie, Libye et Egypte. Il faudrait souhaiter que les partis d’opposition puissent peser de tout leur poids dans ces pays, pour assurer un certain équilibre entre la religion et les libertés.
La troisième priorité est de trouver une solution à la grave crise économique qui a frappé le monde à partir de 2008, notamment en Europe et aux Etats-Unis. L’Europe doit approfondir sa construction politique pour faire face à la crise, en luttant contre le déficit budgétaire et le fort endettement, mais en adoptant également des mesures de relance. Quant aux Etats-Unis, ils doivent réduire leur endettement abyssal par une politique plus rigoureuse de gestion des fonds publics. Il faut espérer également une solution au conflit Israélo-Palestinien qui dure depuis plus d’un demi-siècle, par la création d’un Etat palestinien viable vivant côté à côte avec Israël. Ceci ne sera pas possible que par des sanctions de la part des Etats-Unis et de l’Europe contre le gouvernement israélien. Il faut espérer, mais ce ne sera qu’à moyen et long terme, que la Chine qui a fait des pas géant sur le plan économique, puisse faire de même sur les plans de la démocrate et des droits de l’homme.
CHRONIQUES HEBDOMADAIRES DE l'IMRI