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Intervention militaire française au Mali : Quels enjeux ?

Par Jawad Kerdoudi

Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)


Rappelons tout d’abord que le Mali est un immense pays de l’Afrique de l’Ouest (1,2 M de km2), enclavé et entouré par pas moins de sept pays africains. Peuplé de 15 millions d’habitants, c’était une ancienne colonie française qui a recouvré son indépendance en 1960. Faisant partie de la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest), le Mali a subi depuis son indépendance plusieurs coups d’Etat militaires malgré l’instauration de la démocratie en 1991. Pays pauvre, le Mali fait partie des 49 PMA (Pays les moins avancés) avec une économie essentiellement rurale.

La crise malienne a débuté le 17 Janvier 2012 par des attaques de camps militaires maliens par les rebelles touaregs du MNLA (Mouvement National de Libération de l’Azawad) dans la région Nord du pays, notamment contre les villes de Gao, Tombouctou et Kidal. Le 22 Mars 2012, le Président Amadou Toumani Touré est renversé par un coup d’Etat conduit par le capitaine Haya Sanogo qui a estimé insuffisante la réaction contre la rébellion Touareg au Nord du pays. Le 6 Avril 2012, le MNLA auquel s’est associé le mouvement salafiste Ansar Dine proclame l’indépendance d’Azawad. En Mai 2012, eût lieu une rencontre à Tombouctou entre Ansar Dine et la branche sahalienne de AQMI, le MUJAO (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest). Par la suite, les islamistes parviennent à repousser les rebelles touaregs et à occuper tout le Nord du Mali qui constitue les 2/3 du territoire national, instaurant la loi islamique, la chariaa. Cette dernière s’est caractérisée par des sévices barbares contraires aux droits de l’homme, l’interdiction de la musique profane et des boissons alcoolisées, et la destruction de mausolées. La réaction internationale fut unanime pour condamner l’occupation du Nord du Mali par les islamistes. L’ONU après plusieurs tergivations a fait prendre par le Conseil de Sécurité la résolution 2085 en Décembre 2012 autorisant une opération militaire au Nord du Mali par la CEDEAO, appuyée sur le plan logistique par des puissances occidentales dont la France. Cette opération ne devait avoir lieu qu’en automne 2013.



Dans ma chronique du 3 Janvier 2013 j’avais déjà signalé « Qu’une opération militaire par la CEDEAO doit avoir lieu le plus rapidement possible, car toute solution basée sur la négociation avec les rebelles n’est pas crédible ». Effectivement, les islamistes profitant du retard de l’envoi de troupes armées africaines sur place, ont mené une offensive terroriste le 11 Janvier 2013 prenant la ville de Konna, et menaçant la capitale Bamako qui se trouve à 700 km au sud. Suite à l’appel au secours du Président du Mali par interim Dioncounda Traoré, la France a procédé à une intervention aérienne. L’offensive française a permis à l’armée malienne de reprendre la ville de Konna et de stopper l’avancée des islamistes.



La décision du Président Hollande d’autoriser l’intervention de l’armée française de Mali a été courageuse, car les islamistes détiennent 8 otages français au Sahel et menacent de perpétrer des attentas en France. Les raisons invoquées sont le respect des droits de l’homme, la lutte contre le terrorisme, et l’intégrité territoriale du Mali, sans oublier la protection des 6.000 ressortissants français à Bamako et les intérêts économiques français en Afrique occidentale. L’intervention française au Mali a reçu un consensus quasi-général en France, seul Dominique de Villepin ancien ministre français des affaires étrangères l’a critiqué avec des arguments peu crédibles. Sur le plan international, l’intervention française au Mali a reçu également une suite favorable. La Grande-Bretagne et les Etats-Unis ont promis une assistance militaire et logistique. L’Union européenne ainsi que l’Union africaine ont approuvé cette intervention. Même l’Algérie qui était toujours hostile à toute intervention étrangère dans la région, a indiqué qu’il s’agit d’une décision souveraine du Mali, et a ouvert son ciel aux avions militaires français.



Bien que le Maroc soit loin du théâtre d’opération, notre pays est également concerné par ce qui se passe dans cette région. En effet, la menace des islamistes radicaux dont l’objectif est d’instaurer des républiques islamiques avec la Charia comme loi fondamentale, est de plus en plus forte aussi bien en Afrique du Nord (AQMI) qu’en Afrique de l’Ouest (MUJAO). Cette menace est d’autant plus grave qu’il s’agit non seulement d’un changement de régime politique, mais d’un changement de la société avec tout ce que cela signifiés comme perte de démocratie et de libertés. Aussi, l’intervention française au Mali est parfaitement justifiée, et doit s’accompagner d’une intervention militaire de la CEDEAO et de l’Union africaine pour éradiquer les mouvements islamistes radicaux d’abord au Nord du Mali, et là où ils se trouvent dans le reste de l’Afrique. Sur le plan national, nous devons être très vigilants vis-à-vis des islamistes radicaux dans notre pays, et c’est l’occasion de saluer nos forces de sécurité qui mènent une lutte implacable contre ce fléau.



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