logo_imri
logo_imri

LE MAROC ET L’AFRIQUE SUB-SAHARIENNE

Une stratégie de présence et d’ouverture dynamique

Par Michael Langstaff

Consultant international
Administrateur de l’IMRI

L’Afrique est de plus en plus à l’ordre du jour sur les agendas politiques, économiques et financiers des Etats, des investisseurs et des entreprises de la scène internationale. L’Union Africaine fête son 50ème anniversaire cette année et l’Afrique connaît des taux de croissance que l’Europe lui envie : 5,1% en moyenne depuis dix ans. L’Afrique sub-saharienne, en particulier, a affiché une croissance de 4,8% en 2011 et un tiers des pays de cette région a enregistré des taux de croissance d’au moins 6%.

Le Maroc, quant à lui, a compris depuis longtemps que l’Afrique sub-saharienne constitue le « continent de demain » et son aire d’expansion naturelle, compte tenu de la crise qui sévit en Europe, d’une part, et de la stagnation de l’intégration régionale au niveau de l’Union du Maghreb Arabe, d’autre part. Ce n’est donc pas un hasard, si les assemblées annuelles de la Banque Africaine de Développement (BAD) viennent de se tenir à Marrakech, le Maroc étant, par ailleurs, le principal bénéficiaire des encours de la BAD (à hauteur de 17%).

Depuis son accession au trône, le Roi Mohamed VI a effectué de nombreux voyages en Afrique sub-saharienne : une visite au Burkina Faso, au Cameroun, en RD Congo, au Congo, en Guinée Equatoriale, au Bénin et en Gambie, deux visites au Niger et quatre visites au Gabon et au Sénégal. Tout récemment encore (en mars dernier), le Roi du Maroc a effectué une tournée officielle au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Gabon, accompagné d’une importante délégation d’hommes d’affaires. Au cours de l’ensemble de ces visites, plus de 300 accords ont été signés, notamment sur le commerce, la protection des investissements, la non-double imposition et les transferts de dividendes. A l’occasion de la dernière visite du Roi, au Sénégal, deux accords bilatéraux ont été signés, l’un sur les mines, les hydrocarbures, l’électricité et les énergies renouvelables, l’autre sur le transport routier international de voyageurs et de marchandises. En Côte d’Ivoire, six accords de coopération bilatérale ont porté sur l’entente entre les Ministères des Affaires Etrangères, la pêche maritime et l’aquaculture, la formation professionnelle dans les domaines du tourisme, des services aériens, de la protection civile et de l’encouragement des investissements. Au Gabon, six accords également ont porté, entre autres, sur les technologies et systèmes d’information, les medias, la santé, la prévention et la gestion des risques majeurs.

En outre, au Sénégal, le Roi a inauguré une clinique ophtalmologique, réalisée par la Fondation Alaouite pour le Développement Humain et Durable, ainsi que l’Unité de fabrication de médicaments – West Africa Pharma – réalisée par la société marocaine Sothema et destinée à approvisionner les pays de l’Union économique et monétaire de l’Afrique de l’Ouest (Uemoa) et ceux de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Par ailleurs, le Roi a réaffirmé le projet d’ouverture d’une ligne maritime directe entre le Maroc et le Sénégal afin de développer les échanges commerciaux entre les deux pays. En Côte d’Ivoire, le Maroc a soumis de nouveaux projets d’accord de coopération dans les domaines des ports et du transport maritime, de la coopération industrielle et du développement intégré des ressources en eau des zones humides du littoral, qui devront être examinés et harmonisés au cours de la session de la grande commission mixte de coopération qui se tiendra prochainement à Abidjan.

Le dernier déplacement royal a également permis de faire avancer la ratification de l’accord entre le Maroc et l’Uemoa qui prévoit un traitement tarifaire préférentiel à l’importation au Maroc d’une liste de produits ainsi que des dispositions relatives aux investissements. Regroupant huit pays de l’Afrique de l’Ouest, cette région représente un marché de plus de 80 millions de consommateurs, à fort potentiel de développement.

Ainsi a été méthodiquement préparée, impulsée et accompagnée la percée économique et financière des entreprises marocaines, publiques et privées, dans les pays au Sud du Sahara: les banques (parmi lesquelles la BMCE, à travers sa filiale Bank of Africa - BoA - implantée dans une vingtaine de pays africains, Attijariwafa Bank, avec onze établissements bancaires dans plusieurs pays subsahariens francophones et la Banque Populaire, présente en Guinée Conakry et République Centrafricaine depuis 1990 et depuis 2011 dans tous les pays membres de l’Uemoa), Maroc Telecom (avec ses filiales au Gabon, au Burkina Faso, au Mali et en Mauritanie), Royal Air Maroc (avec des liaisons directes desservant plus de 20 destinations africaines et une augmentation de la fréquence des vols vers les capitales africaines), le BTP et les opérateurs immobiliers, notamment pour la construction de logements sociaux (Addoha, Alliances Développement Immobilier – ADI – et Somagec), les mines (avec l’OCP ,qui a décidé de sécuriser l’approvisionnement de l’Afrique en lui dédiant des volumes de production quel que soit le volume de la demande internationale, Managem ou Stroc Industrie), les medias (des groupes de presse et audiovisuels privés ouvrent des filiales, à l’instar de l’Economiste au Burkina Faso, de Medi1 Radio au Gabon ou de Hit Radio dans sept pays d’Afrique de l’Ouest). Dans le secteur des assurances, Saham Finances s’oriente notamment vers plusieurs marchés de l’Afrique de l’Est anglophone et lusophone. Enfin, les caravanes commerciales, organisées par Maroc Export, accompagnent et encadrent régulièrement des PME et PMI marocaines sur les marchés sub-sahariens.

A ce partenariat Maroco-subsaharien s’ajoute désormais, confirmé par la récente visite au Maroc du Président de la République française, un partenariat Franco-Maroco-Africain, sur la base d’une approche « win-win-win », entre les trois partenaires : une convention a été signée entre l’Agence Française de Développement (AFD) et Attijariwafa Bank pour fournir des outils financiers pour l’accompagnement des entreprises en Afrique subsaharienne afin de soutenir des opérateurs implantés au Maroc, qu’ils soient marocains, français ou franco-marocains, dans leur volonté de s’implanter sur les marchés africains au sud du Sahara.

Ainsi, le Maroc consolide systématiquement ses liens historiques pluri-séculaires, à la fois commerciaux, religieux, culturels et politiques avec l’Afrique au Sud du Sahara et les élargit aux secteurs économiques et financiers, à telle enseigne que ce pays est devenu le premier investisseur africain en Afrique de l’Ouest (après l’Afrique du Sud) et le deuxième sur l’ensemble du continent africain. Cette stratégie géo-politique de coopération Sud-Sud, accompagnée par une diplomatie économique active, doit permettre au Maroc de trouver de nouveaux relais de croissance et de nouvelles sources de revenus, en renforçant sa position de plateforme d’accès en Afrique pour l’Europe et les Amériques.

CHRONIQUES HEBDOMADAIRES DE l'IMRI

page numéro [ 1 ] 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70 71 72 73 74 75 76 77 78 79 80 81 82 83 84 85 86 87 88 89 90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 100 101 102 103 104 105 106 107 108 109 110 111 112 113 114 115 116 117 118 119 120 121