Accord de réconciliation entre le Fatah et le Hamas
Une victoire des Palestiniens
Par Jawad Kerdoudi
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)
Rappelons tout d’abord que les élections présidentielles dans les territoires palestiniens en 2005 ont porté au pouvoir Mahmoud Abbas. Les élections législatives de 2006 ont consacré la victoire du parti islamiste Hamas. En 2007 le Hamas a pris le contrôle de la bande de Gaza entraînant la scission des territoires palestiniens entre la Cisjordanie gouvernée par Mahmoud Abbas et Gaza gouvernée par Ismail Haniyeh.
Depuis 2007 aucune réconciliation entre les deux partis n’a réussi malgré plusieurs tentatives. Entre-temps, et sous l’impulsion du Secrétaire d’Etat américain John Kerry des négociations entre Israéliens et l’Autorité palestinienne ont débuté en Juillet 2013 et se sont terminées sans succès le 29 Avril 2014. Ces négociations devaient aborder les principaux problèmes du conflit israélo-palestinien : la délimitation des frontières du futur Etat palestinien, le sort des réfugiés palestiniens, l’arrêt de la colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, et enfin le statut de la ville de Jérusalem. Malheureusement, aucune avancée n’a pas être réalisée sur aucun de ces problèmes du fait de l’intransigeance des israéliens. Il a semblé tout au long de ces négociations où la colonisation israélienne a continué, que le gouvernement de Netan Yahu n’avait aucune volonté de trouver une solution, et que ce processus de négociations n’avait pour but que de gagner du temps pour renforcer encore plus la colonisation israélienne, rendant impossible toute création d’un Etat palestinien. La goutte qui a fait déborder le vase a été le refus comme promis par Israël de libérer le 29 Mars 2014 un certain nombre de prisonniers palestiniens.
Devant l’intransigeance israélienne, et le peu d’impact de la pression américaine sur le gouvernement israélien, Mahmoud Abbas a demandé en premier lieu l’adhésion de la Palestine 15 agences de l’ONU. En effet, la Palestine qui avait obtenu le 29 Novembre 2012 le statut d’Etat d’Observateur à l’ONU s’était abstenu de demander l’adhésion à ces agences pour ménager Israël. La Palestine pourrait maintenant poursuivre Israël pour crimes de guerre devant la Cour pénale internationale. Mahmoud Abbas a également menacé de dissoudre l’Autorité palestinienne, ce qui obligerait Israël à assurer la responsabilité administrative et sécuritaire de la Cisjordanie comme avant les accords d’Oslo de 1993. La riposte de Mahmoud Abbas a consisté enfin à conclure le 23 Avril 2014 un accord de réconciliation avec le Hamas. Aux termes de cet accord serait formé dans 5 semaines un gouvernement de « consensus national » qui serait dirigé par Mahmoud Abbas, et qui sera composé de personnalités indépendantes. Ce gouvernement aura par tâche de préparer l’organisation d’élections législatives et présidentielles dans les 6 mois.
Afin d’enlever toute ambiguïté, Mahmoud Abbas a déclaré le 26 Avril 2014 que le futur gouvernement palestinien reconnaîtrait l’Etat d’Israël, respecterait les engagements internationaux, et rejetterait la violence et le terrorisme. Les négociations avec Israël seraient menées par l’OLP (Organisation de la Libération de la Palestine) qui représente l’ensemble du peuple palestinien et qui a reconnu l’Etat d’Israël depuis 1993.Cependant, il a ajouté que l’OLP n’acceptera jamais de reconnaître Israël en tant qu’un Etat juif. Le Président palestinien a répété qu’il pourrait prolonger les négociations avec Israël au delà du 29 Avril 2014, mais à condition que le gouvernement israélien libère les prisonniers palestiniens, gèle la colonisation, et discute des futures frontières de l’Etat palestinien. La réponse d’Israël fut la suspension des pourparlers de paix, et une nouvelle frappe de l’aviation israélienne dans le Nord de Gaza qui a fait 6 blessés dont un grièvement.
En conclusion, on ne peut que condamner l’intransigeance d’Israël qui ne veut pas la paix avec les Palestiniens. Le Président Mahmoud Abbas a été obligé de prendre ces mesures n’ayant rien obtenu de positif de la part des Israéliens. Cependant, une nouvelle chance à la paix s’est entrouverte puisqu’il s’agit maintenant de prolonger des négociations avec l’ensemble du peuple palestinien. Même si Israël avait conclu un accord avec Mahmoud Abbas dans les négociations antérieures, il y aurait eu toujours le handicap du Hamas, qui n’aurait pas reconnu cet accord. Espérons que enfin ce conflit qui a duré plus d’un demi-siècle puisse trouver une solution pour rendre justice au peuple palestinien. Cependant rien de concret ne sera obtenu sans une pression forte sur Israël des Etats-Unis et de l’Europe, ainsi qu’un plus grande implication de la communauté internationale, notamment le Quartette pour le Proche-Orient (Etats-Unis, Russie, Union européenne et ONU) qui a brillé jusqu’à maintenant par son inefficacité.
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