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Printemps arabe : La grande d�sillusion �gyptienne

Par Jawad KERDOUDI

Pr�sident de l�IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)


La r�volution �gyptienne a �t� d�clench�e le 25 Janvier 2011 � partir de la fameuse place Attahrir. Les r�volutionnaires ont fait preuve d�une d�termination extraordinaire et d�un grand courage, exigeant la fin du r�gime. Leurs v�ux f�rent exauc�s le 11 F�vrier 2011 avec le d�part de Hosni Moubarak. Le pouvoir devenu vacant a �t� exerc� par le Haut Commandant militaire �gyptien jusqu�aux �lections de Juin 2012 qui virent l�accession � la pr�sidence de l�Egypte de Mohamed Morsi appartenant � la confr�rie des Fr�res Musulmans. Ce dernier s�empressa de pr�parer une nouvelle constitution � forte connotation islamique qui f�t ratifi�e le 22 D�cembre 2012. Le Pr�sident Morsi a commis deux erreurs qui vont lui �tre fatales. Tout d�abord il tenta de r�duire l�importance des pouvoirs de l�arm�e, d�autre part il essaya d�islamiser par la force la soci�t� �gyptienne. Il s�en suivit de grandes manifestations populaires en Juin 2013 regroupant des millions de personnes qui ont demand� son d�part. L�arm�e �gyptienne sous l�impulsion du g�n�ral Abdelfattah Al Sissi en profita pour d�mettre le 4 Juillet 2013 le Pr�sident Morsi, et donner le pouvoir � un magistrat Adli Mansour.

Il faut alors constitu� un Groupe de 50 personne non �lues pour r�diger une nouvelle constitution qui f�t ratifi�e le 15 Janvier 2014 avec un taux de participation de seulement 38,6%. Cette constitution accro�t les pouvoirs du Pr�sident de la R�publique, maintenant la possibilit� de juger des civils par des tribunaux militaires, et indique que le Ministre de la D�fense doit �tre obligatoirement un militaire, et qu�il doit �tre d�sign� avec l�accord de l�Etat-Major. De plus, le gouvernement n�a pas de droit de regard sur le budget de l�arm�e. La constitution relate en outre la stricte �galit� des droits entre l�homme et la femme, et �carte toute islamisation de la l�gislation. La constitution pr�voit enfin l�organisation d��lections l�gislatives et pr�sidentielles. Tous ces �v�nements ont eu lieu pendant trois ans dans un climat de tension o� se sont affront�s les partisans de Mohamed Morsi avec les forces arm�es. C�est ainsi que depuis Juillet 2013, il a �t� d�plor� plus de 500 morts dans les forces de l�ordre. La r�pression f�t �galement terrible contre les islamistes, qui a fait plus de 1400 d�c�s et 15.000 prisonniers. La confr�rie des Fr�res musulmans a �t� d�clar�e organisation terroriste, et des � proc�s de masse � ont eu lieu avec des condamnations de plusieurs centaines de personnes � la peine de mort.



L�ouverture de la campagne pr�sidentielle a eu lieu le 3 Mai 2014 et doit se d�rouler pendant 20 jours, alors que le scrutin est fix� au 26 et 27 Mai 2014. Deux candidats se sont pr�sent�s officiellement : le g�n�ral devenu mar�chal Abdelfattah Al Sissi, et son rival Hamdeen Sabbahi qui appartient � la gauche la�que et qui a obtenu la troisi�me place aux �lections pr�sidentielles de 2012. Ce dernier candidat veut incarner les id�aux de la r�volution de 2011, et met en garde la soci�t� �gyptienne contre le retour � l��re Moubarak avec la supr�matie de l�arm�e. Mais il semble qu�il n�ait aucune chance de l�emporter face � Al Sissi qui a le soutien de l�arm�e et d�une frange de la population civile.



On ne peut qu��tre attrist� par les cons�quences du Printemps arabe �gyptien. Alors que la r�volution de 2011 avait fait na�tre beaucoup d�espoirs pour l��tablissement d�un r�gime d�mocratique, garantissant les libert�s individuels et collectives, et mettant tout en �uvre pour sortir la grande majorit� du peuple �gyptien de la pauvret� et de la mis�re, on assiste pratiquement au retour de l��re Moubarak. Peut �tre allons nous s�acheminer vers un r�gime plus dur car Al Sissi s�est dit d�termin� � �radiquer le mouvement des Fr�res musulmans par la force si n�cessaire. Ce qui a d�natur� la r�volution �gyptienne, c�est la confrontation des deux forces qui pr�dominent dans la soci�t� �gyptienne, � savoir les islamistes et les forces arm�es. Dans une premi�re �tape, les islamistes qui disposent d�un mouvement politique organis� ont remport� les �lections. Au lieu de gouverner pour l�ensemble de la soci�t� �gyptienne y compris les minorit�s, ils ont tent� d�islamiser de force la soci�t� �gyptienne. On constate que dans la plupart des pays arabes, il n�y a que deux forces qui dominent la vie politique : la monarchie ou l�arm�e d�un c�t�, les islamistes de l�autre. Les partis progressistes et modernistes qu�ils soient de gauche ou de droite n�ont pas pu au cours des derni�res d�cennies se tailler une place sur la sc�ne politique nationale. Le seul cas int�ressant est celui de la Tunisie o� les islamistes et les modernistes ont r�ussi � conclure des compromis sauvant la face des uns et des autres. Cela est d� � ce que la Tunisie dispose d�un peuple globalement bien �duqu�, o� les femmes jouent un grand r�le �galement sur le plan politique.



En conclusion, l�Egypte avec la victoire d�Al Sissi n�aura gu�re un avenir enviable. Le nouveau r�gime qui sera instaur� d�pensera beaucoup d��nergie � combattre les islamistes qui ne vont pas se laisser faire, et qui ont l�habitude de vivre dans la clandestinit�. Il va s�en suivre un climat de tension avec sa cohorte de manifestations et de contre-manifestations, et surtout de nombreux morts, de bless�s et prisonniers. Ce grand pays qui a toujours eu un impact consid�rable sur le monde arabe ne m�rite pas le sort qu�on lui r�serve.

CHRONIQUES HEBDOMADAIRES DE l'IMRI

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