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20ème anniversaire de l’OMC à Marrakech
Bilan et perspectives ?

Par Jawad KERDOUDI
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)

Une importante délégation de l’IMRI a participé à la conférence internationale des ministres du commerce et des parlementaires africains qui s’est tenue à Marrakech les 8 et 9 Avril 2015 pour célébrer le 20ème anniversaire de la création de l’organisation mondiale du commerce (OMC).

Rappelons que c’est le 1er Janvier 1995 qu’a été créée officiellement l’OMC après la signature le 15 Avril 1994 à Marrakech de 60 accords par 123 pays. L’OMC est l’héritière du GATT (Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce) qui a été établi en 1947 et qui avait pour but la libéralisation du commerce international. Les objectifs du Gatt étaient la négociation pour réduire les entraves au commerce international et l’énonciation des règles de bonne conduite concernant le commerce international. Le GATT avait établi les trois règles fondamentales : la clause de la nation la plus favorisée, la réciprocité à toute concession tarifaire, la réduction ou la suppression des quotas d’importation.

Après vingt ans d’existence le bilan de l’OMC est mitigé. Certes, elle a permis l’établissement d’une centaine d’Accords qui ont joué un grand rôle dans la libéralisation du commerce international. Les pays émergents tels que le Brésil, la Chine et l’Inde en ont profité pour développer leurs exportations et réduire la pauvreté de leur population. Son action la plus emblématique a été la création de l’ORD (Organe de règlement des différents) qui permet aux pays membres qui s’estiment lésés de porter plainte contre d’autres pays. Valeur aujourd’hui plus de 500 plaintes ont été déposées à l’ORD. L’OMC a joué également un grand rôle dans la veille sur les politiques commerciales à l’international, en s’opposant notamment à toute mesure protectionniste non justifiée suite à la grave crise financière et économique mondiale 2008-2009. Cependant, beaucoup de critiques ont été formulées contre l’OMC par les altermondialistes qui lui reprochent d’avoir favorisé les pays riches et puissants au détriment des petits pays pauvres. L’autre faiblesse de l’OMC a été l’incapacité de conclure le cycle de Doha lancé en 2001 et qui avait initié un programme ambitieux de développement. Il n’a pas abouti du fait de l’opposition entre les pays développés demandant le libre-échange pour les produits industriels, et les pays en développement exigeant la suppression des subventions agricoles accordées par les pays développés et certains pays émergents. Ces défaillances de l’OMC ont poussé plusieurs pays à conclure des accords commerciaux bilatéraux au détriment du commerce multilatéral.

La Conférence ministérielle de l’OMC à Marrakech a réuni plus de 300 personnes dont le Directeur Général de l’OMC le brésilien Roberto Azvedo, et une trentaine de ministres du commerce des parlementaires, ainsi que des représentants des organisations internationales et de la société civile. Cette conférence était orientée sur l’Afrique, dont le Directeur Général de l’OMC a mentionné la centralité au sein de l’OMC, du fait que ce continent est représenté par 40 membres sur 161. Les participants ont tous émis la nécessité d’unifier la position africaine dans les futures négociations de l’OMC afin de peser sur les décisions en faveur de l’Afrique, notamment lors de la future Conférence ministérielle qui se tiendra en Juillet 2015 à Nairobi au Kenya. Ceci d’autant plus que le commerce inter-africain ne représente que 12% du commerce total, d’où la nécessité d’harmoniser les politiques africaines en matière de commerce, et de créer notamment une zone de libre-échange continentale par la réduction des obstacles tarifaires et non tarifaires et l’uniformisation des règles d’origine. Pour développer le commerce africain aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur, les intervenants à la conférence ont souligné la nécessité de développer les infrastructures, la capacité de production, et la mise en œuvre des règles de facilitation du commerce.

D’autre intervenants ont insisté sur la nécessité pour l’Afrique de diversifier sa production, et de produire des biens à forte valeur ajoutée notamment en transformant les matières premières avant exportation. L’Afrique doit absolument entrer dans le processus de mondialisation et de création de valeurs en améliorant sa gouvernance, en augmentant sa compétitivité et sa productivité, et en luttant efficacement contre la corruption. D’autres idées intéressantes ont été émises lors de cette conférence, comme la nécessité de développer le financement interne en Afrique en créant et en élargissant les marchés des capitaux, ou l’intérêt d’instaurer l’Open Sky qui permet une connectivité accrue et une baisse du coût aérien. Une proposition plus provocante a préconisé la suppression des régimes différenciés accordés par l’OMC aux pays en développement, ceci afin de les pousser à faire des réformes et à entrer plus rapidement dans la mondialisation.

En conclusion, cette Conférence ministérielle de Marrakech a permis d’évaluer le bilan de l’OMC vingt ans après sa création, à célébrer ses succès mais aussi à relever les défis d’avenir. Pour ce qui est du continent africain, les intervenants ont indiqué que le décollage a commencé après une longue période de stagnation. L’Afrique avec un milliard d’habitants, la jeunesse de sa population, ses immenses ressources naturelles, a atteint la masse critique pour entrer dans la mondialisation. La condition " sine qua non " est la mise en œuvre d’une stratégie d’intégration et de mutualisation de ses moyens et de ses capacités.

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