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Le péril iranien

Par Jawad KERDOUDI
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)


Le Conseil de Coopération du Golfe a coup sur coup invité le Président Hollande à participer à son Sommet du 5 Mai 2015, et s’est rendu le 12 Mai à Camp David pour rencontrer le Président Obama. C’est que les pays membres de ce Conseil (Arabie Saoudite, Bahreïn, Emirats Arabes Unis, Koweït, Oman et Qatar) sont très inquiets des activités de déstabilisation de l’Iran.

Depuis la proclamation de la République islamique le 1er Avril 1979, l’Iran a modifié considérablement sa politique étrangère. Cette dernière est basée sur les points suivants : opposition aux Etats-Unis et à Israël, volonté de s’ériger en puissance régionale, soutien aux chiites partout où ils constituent une minorité. Afin d’asseoir les moyens de sa politique étrangère, l’Iran tente depuis une décennie de se doter de l’énergie nucléaire. Ce qui inquiète le plus les pays arabes du Golfe c’est la propension de l’Iran à développer son influence au Moyen-Orient en soutenant financièrement et matériellement les Etats et les mouvements qui lui sont favorables. C’est le cas de la Syrie où l’Iran a soutenu dès le départ le régime de Bachar Al Assad non seulement sur le plan politique, mais en envoyant des militaires combattre Daesh sur le terrain. C’est encore le cas de l’Irak, qui grâce à l’invasion américaine de 2003, est entré dans son giron après la prise de pouvoir des chiites dans ce pays. C’est aussi le cas du Yémen avec le soutien aux milices chiites Houtis qui ont renversé le Président Abd Rabo Mansour Hadi, qui ont pris les villes du Sanaa et d’Aden et qui menacent la frontière saoudienne. C’est enfin le cas de Bahreïn avec la tentative infructueuse de renverser le Roi Hamed Ben Issa Al Khalifa après le déclenchement du Printemps arabe. Ce qui a fait dire à un haut responsable iranien : l’Iran contrôle trois capitales arabes : Bagdad, Sanaa, et Damas. L’Iran soutient parallèlement les mouvements Hamas en Palestine et Hizbollah au Liban.

Devant cette offensive iranienne les pays arabes du Golfe et à leur tête l’Arabie Saoudite ne sont pas restés les bras croisés. En Syrie et en Irak, ils font partie de la coalition militaire menée par les Etats-Unis qui combat Daesh par des frappes aériennes, et qui arme l’armée irakienne et kurde. Les objectifs de cette coalition sont de récupérer les territoires occupés par Daesh, et trouver une solution politique en Syrie qui privilégie le départ de Bachar Al Assad. Pour ce qui est du Yémen, l’Arabie saoudite a organisé elle-même un alliance qui combat les Houtis par des frappes aériennes.

Outre l’action militaire, les pays arabes du Golfe ont entrepris une offensive diplomatique en invitant le Président Hollande à participer au Sommet du Conseil de Coopération du Golfe du 5 Mai 2015. La politique française au Moyen-Orient est appréciée par les pays arabes, du fait de la fermeté du Président Hollande sur la question de la Syrie, ainsi que sa détermination concernant le nucléaire iranien. Lors du Sommet de Coopération du Golfe, le Président Hollande a réitéré son soutien aux pays arabes quant à leurs différents avec l’Iran. En contrepartie, il a engrangé la vente à Qatar de 24 avions de chasse Rafale, et l’étude de 20 projets économiques avec l’Arabie Saoudite.

La réunion de ces mêmes dirigeants du Conseil de Coopération du Golfe (sauf le Roi Salman de l’Arabie Saoudite qui a décliné l’invitation) le 12 Mai 2015 à Camp David avec le Président Obama n’a pas été aussi fructueuse. Certes le Président Obama a réitéré l’engagement inébranlable des Etats-Unis avers ses partenaires arabes, et sa volonté de répondre à toute menace contre leur intégrité territoriale. Certes il a dénoncé les activités déstabilisatrices de l’Iran au Moyen-Orient, mais il a opposé son refus à tout accord de défense mutuelle des Etats-Unis avec les pays arabes du Golfe à l’instar du Traité de l’OTAN, arguant que cet accord devrait recevoir le feu vert du Congrès. Le Président Obama a fait comprendre à ses interlocuteurs que l’accord sur le nucléaire iranien était pour lui une priorité, et qu’il souhaitait pour l’avenir un dialogue plus large au Moyen-Orient incluant l’Iran qui ne doit pas être marginalisé. Les pays arabes ont rétorqué qu’il fallait tout mettre en œuvre pour empêcher l’Iran de se doter de l’arme atomique, et qu’ils craignent que la levée des sanctions contre l’Iran va donner plus de capacité financière à ce dernier pays pour développer ses activités déstabilisatrices dans la région.

En conclusion, on ne peut que soutenir les pays arabes du Golfe dans leur offensive diplomatique et militaire pour défendre leurs intérêts face à l’expansionnisme iranien. On peut aussi déplorer que les arabes et les iraniens qui appartiennent tous les deux à la même religion islamique n’arrivent pas s’entendre pour promouvoir le développement économique et social de leur peuple, au lieu de dépenser des sommes faramineuses pour acheter des armes dont profitent l’Occident et la Russie.

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