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L’Accord sur le nucléaire iranien
Quel impact sur le Moyen-Orient et sur le monde ?

Par Jawad KERDOUDI
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)


Après vingt et un mois de négociations, les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU plus l’Allemagne, ont conclu avec l’Iran un accord le 14 Juillet 2015 dont l’objectif principal est d’empêcher l’Iran de se doter de l’arme atomique contre la levée des sanctions.

Les grandes dispositions de l’Accord portent sur la limitation de l’enrichissement de l’uranium par l’Iran en portant le « break-out », à savoir le temps nécessaire pour produire assez d’uranium enrichi pour fabriquer une arme atomique, à au moins un an pendant un durée de dix ans. La seconde disposition a pour objet de limiter la production de plutonium, l’autre matière fissile qui peut être utilisée en vue de la fabrication d’une bombe atomique. Pour contrôler ces deux importantes dispositions, il est prévu des inspections de la part de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AEIA) pendant vingt ans pour vérifier le parc des centrifugeuses, et pendant vingt cinq ans la production d’uranium concentré. En contrepartie, et si les engagements sont respectés par l’Iran, les sanctions tant de l’ONU que de l’Europe et des Etats-Unis seront levées progressivement. Enfin sera maintenu l’embargo vis-à-vis de l’Iran des armes conventionnelles pendant cinq ans et des missiles pendant huit ans.



Dès le lundi 20 Juillet 2015, le Conseil de Sécurité de l’ONU a adopté une résolution entérinant l’accord et prévoyant la levée des sanctions à condition que l’Iran respecte ses engagements. Elle confie le contrôle de l’accord à l’AIEA, et précise que les sanctions ne seront levées qu’après le rapport de cette Agence. La résolution indique le rétablissement automatique des sanctions si l’Iran ne respecte pas ses engagements selon le mécanisme « Snapback ». Il est prévu la possibilité de proroger l’Accord de cinq ans supplémentaires, ce qui portera sa durée totale à quinze ans. Rappelons que les sanctions contre l’Iran portent sur l’interdiction du commerce des biens et services liés aux activités nucléaires, le gel des avoirs financiers des personnes physiques et morales iraniennes, enfin l’embargo sur les armes conventionnelles et les missiles balistiques. L’Accord n’interdit pas les recherches en Iran liées au nucléaire, et n’exclue pas les travaux relatifs aux missiles. Enfin l’accord n’entrera en application que début 2016 si le Congrès américain le ratifie dans les soixante jours à venir.



On ne peut que se féliciter de la conclusion de cet accord, étant donné que le problème du nucléaire iranien a causé une crise internationale de plus de douze années. De plus, il faut saluer le fait que cette crise a été résolue par des moyens pacifiques, alors qu’Israël n’a cessé de réclamer une intervention militaire contre l’Iran, qui aurait eu des conséquences catastrophiques pour la région du Moyen-Orient. Il faut enfin reconnaître que cet accord n’aurait jamais eu lieu, sans la détermination et la patience du Président Obama qui a toujours privilégié l’action diplomatique plutôt que la guerre. Cet accord grâce à la levée des sanctions va permettre au peuple iranien de vivre dans de meilleures conditions, et va consolider le Président Rohani dans sa politique plus modérée sur la scène internationale. De plus grâce à cet accord, l’Iran qui a un PIB de 400 milliards de $ et peuplé de 78 millions d’habitants disposent d’un revenu moyen-supérieur, va voir son économie intégrer le marché mondial et le système financier international. Les Occidentaux aussi bien que les BRICS vont multiplier leurs investissements en Iran dans tous les secteurs notamment celui des hydrocarbures. Quelques investisseurs se sont déjà engagés dans la création de Fonds dédiés à l’Iran, tels que First Frontier Capital, une société d’investissement basée à Londres.



Il faut cependant tempérer cet optimisme du fait que cet accord n’a qu’une durée limitée, et que rien ne pourrait empêcher l’Iran de reprendre la course à l’arme atomique après la fin de l’accord. De plus, la levée des sanctions va fournir à l’Iran de moyens financiers accrus qu’il pourrait utiliser pour accentuer sa politique extérieure. C’est ce qui explique les réticences d’Israël et des pays arabes du Golfe qui ne sont pas complètement satisfaisaits de cet accord. Cette inquiétude s’est développée après les déclarations le 18 Juillet 2015 de Ali Khamenei Guide suprême de l’Iran, qui a dénoncé l’arrogance américaine, empêchant tout dialogue avec les Etats-Unis sur les questions bilatérales, régionales ou internationales. Il a exprimé son manque de confiance vis-à-vis des Etats-Unis, et son soutien aux Hamas de Palestine, aux Houtis du Yémen, aux régimes syrien et irakien, à la minorité chiite de Bahreïn et au Hizboallah libanais. Il a enfin déclaré hypocritement que l’arme atomique est contraire à la religion musulmane (Haram), alors que pendant des décennies son pays a tenté de la mettre en œuvre. Il faudra donc rester vigilant vis-à-vis du régime iranien, en espérant que le progrès économique et social qui résultera de la levée des sanctions puisse renforcer l’aile modérée des gouvernants iraniens.

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