logo_imri
logo_imri

Attentats de Paris
Comment combattre le terrorisme Jihadiste ?

Par Jawad KERDOUDI
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)


Dans la nuit du Vendredi 13 Novembre 2015 Paris a connu des attaques terroristes d’une grande violence. Ce sont des attaques complexes puisqu’elles sont simultanées, au nombre de sept, et qu’elles ne sont pas ciblées. Elles ont touché les abords du Stade de France, 4 cafés ou restaurants des 10ème et 11ème arrondissement, et une salle de spectacles le Bataclan. Le bilan à ce jour est très lourd : 129 morts et 350 blessés dont 42 dans un état très grave. Il faut signaler aussi que ces attaques ont été perpétrées pour la première fois en France par des kamikazes qui ont également utilisé des kalachnikovs. Elles sont le prolongement des actes terroristes qui ont endeuillé Paris du 7 au 9 Janvier 2015 et qui ont fait 17 morts. Les auteurs de ces attentats terroristes sont pour la plupart des français d’origine musulmane.

La première question qu’on peut se poser est pourquoi c’est la France et sa capitale qui sont visées ? Les attentats de Janvier 2015 ont concerné Charlie-Hebdo qui avait publié des caricatures du Prophète Mohamed, et une Super Cacher en relation avec le conflit israélo-palestinien. Comme déjà dit, les attentats du 13 Novembre 2015 n’étaient pas ciblées et avait par but de punir la France pour son intervention en Syrie. En effet, la France a entrepris l’automne dernier des frappes aériennes en Syrie contre l’Etat islamique Daesh dans le cadre de la coalition menée par les Etats-Unis. Les terroristes de Daesh avaient auparavant selon toute vraisemblance mis une bombe dans l’avion russe le 31 Octobre dernier provoquant son crash en Egypte et occasionnant la mort de 217 personnes. De même le 12 Novembre, ils ont attaqué la banlieue sud de Beyrout pour punir le Hezbollah pour son alliance avec le régime de Bachar Al Assad provoquant 43 morts et 239 blessés.




La deuxième question qu’on peut se poser c’est pourquoi ce sont des jeunes français d’origine musulmane qui commettent ces horribles crimes allant jusqu’à sacrifier leur vie ? Les raisons sont multiples. Il faut d’abord rappeler qu’à la suite du boom économique de la France dans les années soixante, un grand nombre de nord-africains d’origine musulmane ont émigré en France. Ils ont été rejoint par la suite par d’autres émigrés dans le cadre du regroupement familial, et pour des raisons économiques. La population musulmane en France est actuellement estimée à 5 millions de personnes. La première génération d’émigrés musulmans a été appréciée pour son travail et sa bonne conduite. Les générations qui ont suivi ont obtenu la nationalité française et ont fréquenté les écoles de la République. Malheureusement, l’intégration de ces jeunes dans la société française ne s’est pas faite, notamment pour ceux qui n’ont pas poursuivi leurs études au niveau supérieur. Cantonnés dans des quartiers périphériques, étant le plus souvent sans emploi ou occupant des emplois précaires, ces jeunes sont devenus la proie de l’islamisme radical. Ce dernier s’est développé un peu partout dans le monde musulman à la faveur de l’invasion américaine en Afghanistan et en Irak, à la persistance du conflit israélo-palestinien, et du mode de vie des occidentaux. L’islam radical prône le retour aux sources de la religion musulmane et notamment l’application intégrale de la Charia. C’est sur ces bases qu’a été établi l’Etat islamique dans une partie de l’Irak et de la Syrie, avec le rêve de reconstituer un Califat regroupant tous les pays musulmans. Par un travail pernicieux de lavage de cerveaux dans certaines mosquées salafistes et par internet, beaucoup des jeunes français ont rejoint les rangs de l’Etat islamique où ont été poussés à commettre des attentats sur le sol français. A ces jeunes a été promis l’entrée au Paradis après la mort en tant que martyrs.




Après ces explications, on ne peut que condamner avec la plus grande force ces actes terroristes aveugles qui frappent des innocents dont aussi des musulmans. De plus ces actes sont commis au nom de l’Islam. Le Conseil Supérieur des Oulemas du Maroc dans une Fatwa a indiqué que « ces actes sont formellement bannis par la religion islamique » et a rappelé le verset coranique « Celui qui tuerait un homme non coupable d’un meurtre ou délit sur la terre, c’est comme s’il avait tué tous les hommes ». C’est donc une infime minorité de fanatiques qui déforment les fondements de l’Islam et qui risquent de détériorer dans le monde l’image de la religion musulmane. Il ne faut en aucun cas faire l’amalgame entre ces fanatiques et la grande majorité des musulmans qui veulent vivre en paix et en bonne intelligence avec les autres habitants de la terre. D’ailleurs le leader politique français Jean-Luc Melanchon a déclaré après les attentats de Paris « aucune religion n’est coupable dans cette circonstance ».




Pour éradiquer le terrorisme islamique, la communauté internationale doit s’unir tout d’abord pour détruire l’Etat islamique (Daesh) qui est sa source principale. Il faut mettre en œuvre des forces terrestres car les frappes aériennes ont montré leur insuffisance. Il faut également assécher les sources de financement de Daesh : aide financière directe, achat de pétrole et de gaz provenant de Syrie et d’Irak. Il faut s’activer pour trouver une solution au problème israélo-palestinien qui est une source de grande frustration pour les musulmans. Il faut également aider à la résolution des guerres civiles en Syrie, Libye, et Yémen, et fournir une aide pour le développement des pays arabes qui ont le plus souffert des conséquences du Printemps arabe. Parallèlement, il faut mener une lutte idéologique contre les thèses des fanatiques musulmans par internet et l’élimination des prédicateurs salafistes, et en prônant comme le fait le Maroc un Islam modéré et tolérant. Il faut aussi concevoir une nouvelle politique vis-à-vis des jeunes français d’origine musulmane, à la fois sur le plan idéologique mais aussi matériel par la formation, la création d’emplois, de centres de loisirs, de logements décents, et ce afin de faciliter leur intégration dans la société française.

CHRONIQUES HEBDOMADAIRES DE l'IMRI

page numéro [ 1 ] 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70 71 72 73 74 75 76 77 78 79 80 81 82 83 84 85 86 87 88 89 90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 100 101 102 103 104 105 106 107 108 109 110 111 112 113 114 115 116 117 118 119 120 121