La conférence de Copenhague
Des résultats décevants
Par Jawad Kerdoudi Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)
La conférence de Copenhague sur le changement climatique s’est terminée le samedi 19 Décembre 2009 avec des résultats décevants. Cette conférence internationale avait cependant réuni 193 pays, et 120 chefs d’Etat et de gouvernement se sont déplacés à Copenhague vers la fin de la conférence. Elle avait trois objectifs principaux : déterminer les taux de réduction de gaz à effet de serre, prévoir des mécanismes de contrôle des engagements pris, et fixer une aide financière aux pays en voie de développement pour leur permettre de supporter les conséquences du changement climatique. Après deux semaines de négociations, la conférence a accouché d’un Accord non contraignant, et qui n’a pas été signé par tous les pays participants à la conférence. En fait, cet Accord n’a été négocié que par 26 pays, et principalement par cinq d’entre eux (Etats-Unis, Chine, Brésil, Inde et Afrique du Sud). C’est ainsi que l’Union européenne et les pays en voie de développement ont été marginalisés. En fait, c
Les principales dispositions de l’Accord concernent tout d’abord la réduction des émissions des gaz et effets de serre. Mais cette réduction n’est pas chiffrée par pays. Il est indiqué seulement que les signataires se fixent l’objectif de limiter la hausse à 2° C par rapport à l’ère pré-industrielle à l’horizon 2050. En ce qui concerne la vérification et le contrôle des engagements, il n’a pas été décidé la création de l’organisation mondiale de l’environnement (OME), qui avait été proposée par l’Union européenne. La Chine s’est en effet opposée à toute vérification internationale, en invoquant le respect de la souveraineté nationale. Tout au plus, il a été décidé que les pays émergents adressent tous les deux ans à l’ONU, un rapport sur leurs actes de réduction des émissions de gaz à effet de serre, et d’adapter leur législation aux engagements pris. En ce qui concerne l’aide aux pays en voie de développement, il a été décidé de mettre à la disposition de ces pays 100 milliards de $ par an à partir de 2020. Pour l’immédiat (2010-2012), il est prévu une aide de 30 milliards de $. Au cours de la conférence, l’Union européenne a avancé pour cette dernière période une aide 10,6 milliards de $, le Japon 11 milliards de $ et les Etats-Unis 3,6 milliards de $. Il a enfin été décidé des mesures incitatives pour financer la protection des forêts. D’autre part, les pays développés doivent envoyer à l’ONU d’ici fin Janvier 2010 leurs engagements précis de réduction d’émissions des gaz à effet de serre.
L’Accord de Copenhague n’a donné satisfaction à aucune partie, sauf la Chine qui a déclaré par son représentant « Tout le monde devait être satisfait ». Quant au Président Obama, il a déclaré « Ce n’est qu’une étape : il nous faut aller beaucoup plus loin ». Les pays en développement ont tous manifesté leur mécontentement, et les écologistes ont qualifié cet Accord de «lamentable fiasco». En tout cas, cet Accord n’a pas été approuvé par tous les pays participants à la conférence, et les délégués des pays représentés ont seulement pris note de l’Accord. Les prochaines étapes de la négociation internationale du changement climatique vont être la conférence de Bonn (Allemagne) qui aura lieu dans six mois, et la prochaine conférence internationale sur le climat qui aura lieu à Mexico en Décembre 2010.
L’Accord de Copenhague montre la prévalence des intérêts nationaux dans les relations internationales. Le Président Obama de peur d’une non-ratification par le Sénat, n’est pas allé assez loin dans les concessions des Etats-Unis. La Chine, soucieuse avant tout de son développement économique, s’est opposée de toutes ses forces à toute vérification internationale de ses futurs engagements. L’Union européenne, malgré la détermination du Président Sarkozy, n’a pas pesé suffisamment sur les négociations. Quant aux pays en développement, ils n’ont pas eu tout simplement voix au chapitre. Enfin, cet Accord montre encore une fois l’inefficacité de la gouvernance mondiale, et la nécessité de réformer en profondeur l’ONU. Il n’est pas possible de prendre des décisions à l’unanimité lorsqu’il y a 193 participants.
On ne peut que déplorer les résultats décevants de la conférence de Copenhague. Cependant ce qui est acquis, c’est la prise de conscience internationale du danger que représente le changement climatique pour la planète entière. C’est pour cela qu’il faut continuer la lutte pour obliger les responsables politiques à prendre des décisions concrètes. Tout doit être mis en œuvre dès maintenant pour préparer la conférence de Mexico de Décembre 2010. La société civile doit continuer à se mobiliser pour cette cause à travers tous les pays du monde. Un autre moyen d’arriver aux objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, est de redoubler d’efforts pour rendre rentables les énergies renouvelables (éolienne, solaire, biomasse). Si elles le deviennent, le secteur privé y aura recours au détriment des énergies fossiles, avec ou sans l’accord des gouvernements. Quant à notre pays le Maroc, au-delà des conventions internationales, il doit tout mettre en œuvre pour promouvoir l’économie verte, c’est à dire l’économie dépourvue de carbone. Et cela pour deux raisons : tout d’abord, il ne dispose pas pour le moment d’énergies fossiles (pétrole, charbon, gaz), ensuite en développant les énergies renouvelables (éolienne, solaire, biomasse) il préservera son environnement propre et celui de la planète. Tous les efforts doivent être entrepris par les décideurs marocains pour le développement de l’économie éolienne et solaire, notamment en attirant vers notre pays une partie des aides promises par l’Accord de Copenhague.
CHRONIQUES HEBDOMADAIRES DE l'IMRI