Premier Anniversaire de l’agression israélienne contre GAZA : Un Avenir Sombre
Par Jawad Kerdoudi Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)
C’est en effet le 27 Décembre 2008, il y a tout juste un an, qu’Israël a débuté son opération militaire barbare contre la bande de Gaza, intitulée « Plomb durci ». Cette opération a duré trois longues semaines contre des civils désarmés. Le bilan est effrayant : 1400 victimes palestiniennes dont en majorité des femmes et des enfants, contre 13 victimes israéliennes. L’opération a entrainé des destructions massives de maisons, d’infrastructures dont des hôpitaux et des écoles, pratiquement la quasi-totalité des services publics. La réaction de la communauté internationale devant cette agression injuste fût molle. Le Président tchèque du Conseil européen a eu l’outrecuidance de la qualifier «d’acte de légitime défense». Le Président Bush alors en fonctions, l’a également justifié en laissant le massacre perdurer. Les pays Arabes divisés, n’ont pas pu agir efficacement, et ont démontré à nouveau leur impuissance. Ce n’est que le 18 Janvier 2009 que l’ONU a pu stopper l’opération. Le rapport d’enquête de l’ONU sur l’opération « Plomb durci » a accusé Israël de crime de guerre. Mais l’éventualité de poursuites judiciaires contre l’Etat hébreu devant la Cour pénale internationale n’a que peu de chances d’aboutir.
Cette opération n’a eu aucun résultat concret sur la résolution du conflit israélo-palestinien, puisque le statu-quo ante demeure. De plus, malgré les promesses de la communauté internationale, le blocus israélien est maintenu contre la bande Gaza, empêchant toute reconstruction. A titre d’illustration, au cours de toute l’année dernière, seuls 41 camions contenant des matériaux de construction ont été autorisés à pénétrer à Gaza, alors qu’il faudrait des milliers pour reconstruire les villes et les villages. Cette situation ne permet pas la reprise normale des activités économiques, ce qui fait que 80% de la population de la bande de Gaza dépend de l’aide internationale. En fait, le blocus de Gaza par Israël a débuté dès Juin 2007 après le succès du Hamas aux élections palestiniennes. Depuis, les coupures d’eau, de gaz et d’électricité sont fréquentes, et rendent la vie quotidienne insupportable. Pour couronner le tout, l’Egypte vient de décider de construire une barrière souterraine d’acier longue de 10 Km avec une profondeur de 30 mètres sous terre. Cette barrière qui longe le terminal de Rafah a pour but d’empêcher tout passage de marchandises par les tunnels entre l’Egypte et la Bande de Gaza. Elle a pour but d’étrangler un peu plus le ravitaillent des habitants de Gaza qui sont au nombre d’un million et demi. Enfin un convoi d’aide à Gaza, initié par le député britannique George Golloway a vu son entrée refusée par les autorités égyptiennes par le part de Nouiba (Mer rouge) permettant un accès rapide vers la bande de Gaza. Ce convoi composé de 250 camions financés par des européens, des turcs et des arabes, est pourtant purement humanitaire puisqu’il ne contient que de la nourriture et du matériel médical.
L’avenir du conflit israélo-palestinien est sombre. Suite à l’agression israélienne contre Gaza, les élections législatives en Israël ont porté au pouvoir le 10 Février 2009 Benjamin Netanyahu, qui a constitué un gouvernement composé de la droite, du centre-gauche, et de l’extrême droite. Le centre, du parti Kalima, a refusé de participer à ce gouvernement. Aux affaires étrangères a été désigné l’ultra-nationaliste Avigdor Liberman. Ce résultat des élections traduit un sentiment de peur de l’électorat israélien, qui a préféré donner le pouvoir à la droite et à l’extrême droite. Comme on pouvait s’y attendre, le gouvernement Netanyahu a été encore plus intransigeant que les précédents. Malgré la pression du Président Obama, le gouvernement Israélien a refusé le gel de la colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem. Il a entrepris une véritable judaïsation de la partie Est de Jérusalem. Il affirme que cette ville est la capitale indivisible de l’Etat hébreu. La semaine dernière, Netanyahu a proposé sans succès au parti Kalima d’entrer dans le gouvernement.
Quant aux Palestiniens, la situation n’est guère meilleure. Le pays est toujours divisé entre la Cisjordanie gouvernée par le Fatah, et la Bande de Gaza gouvernée par le Hamas. Les tentatives de réconciliation entre les deux parties sous l’égide de l’Egypte n’ont encore rien donné. Devant l’intransigeance israélienne quant au gel de la colonisation, Mahmoud Abbas a suspendu les négociations de paix avec Israël. Il a prévu l’élection présidentielle palestinienne en Janvier 2010, mais qui sera reportée du fait du refus du Hamas d’organiser le scrutin dans la Bande de Gaza. Mahmoud Abbas a même annoncé qu’il ne se représenterait pas à la prochaine élection présidentielle.
Le conflit israélo-arabe qui dure depuis plus d’un demi-siècle n’est pas prêt d’être résolu. La responsabilité première est celle d’Israël, qui refuse le principe de l’échange de la paix contre la cession des territoires arabes occupés en 1967. Israël a pourtant appliqué ce principe avec l’Egypte en cédant le Sinaï. Elle pourrait obtenir également la paix avec la Syrie et l’Autorité palestinienne en cédant le Golan et la Cisjordanie. La responsabilité de la situation actuelle est aussi celle de l’Occident, et notamment des Etats-Unis, qui ont dans le passé soutenu aveuglement l’Etat d’Israël dans toutes ses initiatives, notamment la colonisation de la Cisjordanie et de Jérusalem. L’intransigeance d’Israël a été la cause de la montée de l’extrémisme aussi bien en Palestine avec le Hamas qu’au Liban avec le Hizbollah. Aucune concession majeure n’a été consentie à Mahmoud Abbas pour lui permettre de lutter contre les extrémistes, et contrôler la situation. La seule solution possible est la reprise des négociations entre Palestiniens et Israéliens avec le gel de la colonisation, et des avancées sur les autres questions majeures : délimitation du territoire du futur Etat palestinien, statut de Jérusalem, problème des réfugiés. Pour cela les Etats-Unis et l’Europe doivent redoubler leur pression sur le gouvernement israélien. Les pays Arabes doivent reformuler leur proposition de paix avec Israël en échange des terres arabes occupées depuis 1967. Il est nécessaire de convaincre le peuple israélien de la volonté de paix des pays Arabes, afin d’éliminer le sentiment de peur qui le pousse à voter en faveur de la droite et l’extrême droite. Il faut enfin que la Ligue Arabe soit plus dynamique sur ce dossier, et tente de réconcilier le Fatah et le Hamas.
Puisse 2010 ramener enfin la paix dans cette région.
CHRONIQUES HEBDOMADAIRES DE l'IMRI