Relations Internationales
Les grands défis de 2010
Par Jawad Kerdoudi Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)
Le premier Janvier nous fêtons la nouvelle année, mais cette dernière n’efface pas la précédente. Le calendrier n’est qu’une invention humaine pour fixer des repères. En fait, tous les événements que nous avons connus en 2009 vont avoir leur prolongement en 2010, en plus des événements nés les années précédentes. Aussi, les grands défis de la planète en 2010 vont concerner les conséquences de la grave crise économique qui a frappé le monde en 2008 et 2009. Les conflits régionaux : Afghanistan, Pakistan, Irak, Iran, Palestine, vont continuer à peser sur la scène politique internationale. Il faudra trouver des solutions à la grippe AH1N1 qui s’est déclenchée au Mexique en Avril 2009, et au phénomène endémique du terrorisme international, qui a failli frapper à nouveau le vol de l’Airbus de Northwest Airlines entre Amsterdam et Détroit aux Etats-Unis le 25 Décembre dernier. Le changement climatique sera également à l’ordre du jour, puisque la Conférence de Copenhague de Décembre 2009 n’a rien résolu.
Rappelons que la grave crise financière internationale a eu ses plus grands effets aux Etats-Unis le 15 Septembre 2008 avec la faillite de la Banque américaine Lheman Brothers. Ce fût une crise systématique qui a failli décapiter l’ensemble du système financier international. Elle fût suivie par une grave crise économique qui a surtout frappé les Etats-Unis, l’Europe, et les pays en développement. Les effets les plus pernicieux fûrent la baisse de l’activité économique et la montée du chômage. Heureusement, la communauté internationale a agi rapidement par l’intermédiaire du G20 : groupement des pays les plus développés de la planète, y compris les pays émergents. Les plans de relance phénoménaux qui ont mis en œuvre, la baisse des taux d’intérêts, et la mobilisation des capitaux publics, ont pu juguler la crise économique mondiale. Aussi, 2010 s’annonce comme une année de reprise. C’est ainsi qu’il est prévu par les experts les taux de croissance suivants : 2 à 3% pour l’Europe, 3 à 4% pour les Etats-Unis, 4% pour la région Mena et 5 à 10% pour l’Asie. Mais des difficultés vont persister pour l’emploi, la consommation, les petites et moyennes entreprises, et certaines banques. Pour l’emploi, il n’est pas prévu de reprise en 2010 pour l’Europe, alors que les Etats-Unis vont connaître un rebondissement dès le deuxième trimestre 2010. La consommation des ménages va souffrir des restrictions de crédit, et de la tendance à l’épargne et à la limitation de l’endettement. Quant aux PME, elles vont continuer à subir les restrictions de crédit des banques. Ces dernières vont en effet devoir augmenter leurs fonds propres et leur marge, et prendre moins de risques. Si certaines grandes banques internationales sont maintenant remises sur pied, d’autres devront assainir leurs actifs douteux. Quant aux Bourses internationales, après avoir subi un plongeon vertigineux jusqu’à Mars 2009, elles ont repris des couleurs depuis, et sont maintenant dans une bien meilleure situation. Enfin, la plupart des Etats se sont endettés à 100% et plus de leur PIB, et vont trouver des difficultés à réduire leur déficit dans les prochaines années. Tout cela pour dire qu’il faut aborder l’année 2010 sur le plan économique avec un optimisée modéré.
Les conflits régionaux se sont malheureusement aggravés en 2009. Malgré l’envoi de 40.000 soldats supplémentaires par les Etats-Unis et ses allies, la situation en Afghanistan sur le terrain reste très difficile, et les attaques des Talibans ont gagné en intensité et en efficacité. Les attentats se multiplient, et les victimes sont en augmentation tant chez les civils afghans, que les militaires de l’OTAN. Sur le plan politique, les élections présidentielles d’Aout 2009 ont été entachées de fraudes, et le Président Karzaï n’a été réélu que par abandon de son adversaire. Le Pakistan voisin connaît lui aussi des troubles graves dans certaines régions. En Irak, la situation n’est guère meilleure. Les Jihadistes attaquent de plus en plus les symboles de l’Etat, tels que les gouvernorats et les sièges des conseils provinciaux. La décision du Président Obama de retirer toutes les troupes américaines fin 2011 reste problématique, si la situation sécuritaire ne s’améliore pas d’ici là. L’Iran connaît aussi une grave crise politique. Sur la question du nucléaire iranien, aucune solution n’a été trouvée jusqu’à maintenant, malgré les sanctions de l’ONU, et les multiples réunions internationales tenues à ce sujet. En plus, la réélection d’Ahmadinejad le 12 Janvier 2009 est vigoureusement contestée par l’opposition qui multiplie les manifestations, et qui est sévèrement réprimée par les autorités en place. Enfin, le conflit israélo-palestinien est également dans l’impasse, suite à la formation en Février 2009 du gouvernement Netanyahu constitué principalement des partis de droite et d’extrême droite.
D’autres questions internationales vont occuper les dirigeants de la planète en 2010. La grippe AH1N1 qui s’est déclenchée au Mexique en Avril 2009 a déjà fait 10.000 morts à fin Décembre 2009. On s’achemine pour juguler ce fleau, vers une vaccination générale des populations malgré leurs réticences. Le terrorisme international s’est à nouveau fait parler de lui, puisqu’une tentative d’attentat contre un vol international a été déjoué in extremis le 25 Décembre 2009. Quant au changement climatique, la conférence de Copenhague a été un échec, et n’a pas abouti comme on l’espérait à des engagements contraignants de la part des grands pollueurs de la planète : Etats-Unis, Chine, Union européenne. Ce grave problème a été reporté à la prochaine conférence de Mexico qui aura lieu en Décembre 2010.
Comme on le voit, les problèmes du monde sont nombreux et complexes. La gouvernance mondiale n’est pas à la hauteur pour trouver rapidement des solutions. L’ONU a montré largement son inefficacité. Après la chute de l’URSS, la gouvernance mondiale est devenue multipolaire. Les grands acteurs mondiaux sont actuellement les Etats-Unis, la Chine et l’Union européenne. Certes l’élection du Président Obama a fait naitre beaucoup d’espoir, mais sa première année de présidence n’a abouti qu’a de faibles résultats sur le plan international. La Chine défend âprement ses propres intérêts, et se soucie peu du sort du monde. On l’a constaté à la conférence de Copenhague, où elle refusé tout contrôle de ses futurs engagements d’émissions de gaz à effet de serre. De même que sur le plan économique, elle n’a pas donné suite à la demande pressante de réévaluation du Yuan. Quant à l’Union européenne, certes le Traité de Lisbonne a permis la désignation d’un Président du Conseil européen, mais ce dernier ne peut guère jouer un rôle international important, du fait de la puissance de certains Etats européens, tels que l’Allemagne de la Chancelière Merkel, ou la France du Président Sarkozy. Espérons malgré tout, que 2010 sera meilleure que 2009.
CHRONIQUES HEBDOMADAIRES DE l'IMRI