Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)
Par Jawad KERDOUDI, L’Accord de Pêche Maroc-Union européenne : Une belle victoire mais il faut rester vigilant
Le Lundi 19 Février 2018 le Maroc a enregistré une belle victoire. En effet, les ministres de l’agriculture et de la pêche des 28 Etats membres de l’Union européenne ont donné mandat à la Commission européenne pour négocier un nouvel accord de pêche avec le Maroc. Ce mandat a été adopté à l’unanimité des membres du Conseil. Rappelons que l’actuel accord de pêche entre le Maroc et l’Union européenne est entré en vigueur en 2014 et doit s’achever en Juillet 2018. Il donne l’accès à 200 navires de pêche européens à la zone de pêche atlantique du Royaume. La contribution financière accordée au Maroc est de 30 Millions d’euros par an, financé par l’Union européenne et 10 millions d’euros financés par les armateurs européens.
Cette décision de renouveler l’accord de pêche avec le Maroc a été prise suite à un rapport européen des Affaires maritimes. Ce rapport d’évaluation rétrospective et prospective juge que l’accord est efficace dans l’atteinte de son objectif de durabilité et d’exploitation, et estime qu’il a également atteint son objectif de soutien au développement durable du secteur. L’appui sectoriel de l’accord de pêche se fait à un rythme très satisfaisant. C’est ainsi que les régions de Dakhla-Oued Eddahab et Laayoune-Boujdour-Sakia Al Hamra concentrent 60% de l’enveloppe totale de l’appui sectoriel, soit environ 37 millions d’euros. Le rapport note également que pour l’Union européenne l’accord est un bon retour sur investissement, et qu’il est pertinent quand aux besoins de l’Union européenne.
Cependant, malgré ce mandat de renouvellement de l’Accord de pêche entre le Maroc et l’Union européenne, notre pays doit rester vigilant. En effet, depuis quelques années et en ce qui concerne surtout les accords agricoles et de pêche, le Maroc subit un certain harcèlement juridique de la part des ennemis de notre intégrité territoriale, contestant l’application de ces accords aux provinces du Sud. En effet, le 10 Janvier 2018 l’avocat général de la Cour de justice de l’Union européenne Melchior Wathelet a émis un avis selon lequel l’accord de pêche entre le Maroc et l’Union européenne serait invalide. Des voix se sont élevées en Europe pour appeler la Cour qui doit se prononcer le 27 Févier 2018, à ne pas prendre en considération cet avis qui n’est pas contraignant. L’avis de l’avocat général n’engage que sa personne. La pratique précédente sur l’affaire de l’Accord agricole montre que les conclusions de l’avocat général ne sont pas toujours prises en compte ou suivies. De plus, Melchior Wathelet n’est qu’un juge parmi les quinze qui composent la Cour européenne. Son avis équivaut à l’opinion d’un juge rapporteur, et n’est en aucun cas l’équivalent d’un arrêt ou d’une décision.
En conclusion, Le Maroc doit peser de tout son poids pour une décision en sa faveur de la Cour de justice de l’Union européenne le 27 Février 2018. L’Union européenne de son côté doit éviter d’envoyer des signes contradictoires. D’un côté, elle félicite la bonne exécution de l’accord de pêche, ainsi que son impact fort et visible sur la population concernée. De l’autre côté, un juge de la Cour européenne invalide ce même accord. L’accord de pêche entre le Maroc et l’Union européenne ne revêt pas un aspect stratégique pour notre pays, mais il est important que les accords signés avec l’Union européenne ou tout autre pays s’appliquent à tout le Royaume et notamment les Provinces du Sud.
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