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Retrait des Etats-Unis de l’accord nucléaire iranien : Quelles conséquences ?

Par Jawad KERDOUDI,

Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)

Le Président américain Donald Trump a annoncé le Mardi 8 Mai 2018 le retrait unilatéral des Etats-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien signé en 2015 par Barack Obama. Il a annoncé également qu’il allait rétablir le plus haut niveau de sanctions économiques contre l’Iran.

Rappelons que l’accord sur le nucléaire iranien a été signé le 14 Juillet 2015 à Vienne après vingt mois de négociations entre les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité dont les Etats-Unis, plus l’Allemagne et l’Iran. Il prévoit une levée progressive des sanctions adoptées par l’ONU depuis 2006, ainsi que des mesures de rétorsions américaines et européennes. En échange, l’Iran accepte une limitation drastique de son programme nucléaire avec un contrôle strict de l’Agence internationale de l’énergie (AIEA). Les restrictions techniques au programme nucléaire iranien seront progressivement levées entre 2025 et 2050. Cet accord a été attaqué à plusieurs reprises par Donald Trump pendant sa campagne électorale le qualifiant « de pire accord jamais signé par les Etats-Unis ». Il lui reproche trois lacunes : la durée de l’accord limitée à 10 ans, la non prise en compte des missiles balistiques iraniens, la politique agressive de l’Iran au Moyen-Orient. Malgré que l’AIEA a certifié que l’Iran respectait l’accord, Donald Trump a mis en œuvre sa promesse de retirer les Etats-Unis de cet accord.



Les conséquences de la décision de Donald Trump de retirer les Etats-Unis de l’accord nucléaire iranien sont multiples. Tout d’abord, Donald Trump n’a pas respecté la signature des Etats-Unis et l’ordre international. En effet, l’accord sur le nucléaire iranien avait été entériné par une résolution adoptée à l’unanimité par le Conseil de sécurité de l’ONU. Cette décision ébranle le système multilatéral et décrédibilise les institutions internationales. Elle met en cause la paix et la stabilité au Moyen-orient qui peut se transformer en vraie guerre et embraser toute la région.



Les conséquences de la décision de Donald Trump sur l’Iran sont imprévisibles. Alors que le Président américain espère qu’elle va affaiblir le gouvernement iranien, et entraîner même un changement de régime, l’inverse peut se produire en renforçant les éléments les plus durs de la gouvernance iranienne. L’Iran avait menacé de reprendre son programme nucléaire si les Etats-Unis se retiraient de l’accord. Il vient d’assouplir sa position en acceptant de rencontrer les dirigeants chinois et russes, et de participer à une réunion le lundi 14 Mai 2018 à Paris avec les européens (Allemagne, France, Royaume-Uni) dans le but de sauver l’accord s’il obtient les garanties économiques. En effet, les européens signataires de l’accord ainsi que la Chine et la Russie se sont prononcés contre la décision de Donald Trump. De son côté, Frederica Mogherini, Haute Représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères, a déclaré également être favorable à la préservation de l’accord sur le nucléaire iranien. La question du nucléaire iranien met en cause pour la première fois la solidité de l’Alliance atlantique sur un problème majeur.



A ces considérations d’ordre politique s’ajoutent des problèmes économiques. Tout d’abord l’affaiblissement de l’économie iranienne qui est déjà en mauvaise posture : chute de la monnaie iranienne le rial, inflation à 10%, chômage des jeunes à 28,1%. D’autre part, la décision de Donald Trump va faire augmenter le prix du baril de pétrole qui est déjà actuellement de 76 $, du fait de la difficulté par l’Iran d’exporter à l’avenir son pétrole vers les pays occidentaux. D’autre part, suite à la signature de l’accord sur le nucléaire iranien en 2015, les européens notamment l’Allemagne et la France, ont levé les sanctions économiques et ont développé leurs relations commerciales et les investissements avec l’Iran. Partant du principe d’extraterritorialité, les lois américaines menacent les entreprises étrangères installées aux Etats-Unis de sanctions, si elles exercent leur activité dans des pays sous embargo américain. Les tribunaux américains ont élargi ce principe aux entreprises étrangères qui utilisent des banques américaines ou qui libellent leurs contrats en dollars. Cette question épineuse sera discutée très prochainement entre américains et européens.

La décision de Donald Trump sur l’accord nucléaire iranien présente cependant un aspect positif. L’Iran en voulant acquérir la bombe atomique, en développant son arsenal de missiles balistiques, veut se positionner en puissance régionale au Moyen-Orient. D’autre part, l’Iran œuvre activement pour développer le « croissant chiite » englobant l’Irak, la Syrie et le Liban. Il impose une confrontation permanente à l’Arabie Saoudite qui représente le camp sunnite. Aussi faut-il espérer que dans la révision de l’accord actuel, ou dans la négociation d’un accord complémentaire, il soit mis fin à la politique agressive de l’Iran au Moyen-Orient et même en Afrique du Nord. Tout dernièrement, le Maroc a rompu ses relations diplomatiques avec l’Iran du fait du soutien militaire du Hezbollah au Polisario par l’intermédiaire de l’Ambassade iranienne en Algérie.

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