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Le nouveau gouvernement espagnol
Quelles perspectives pour le Maroc ?

Par Jawad KERDOUDI,

Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)


Le 1er Juin 2018, le parti socialiste espagnol (PSO) a présenté au Parlement une motion de censure vis-à-vis du gouvernement conservateur dirigé par Mariano Rajoy. Cette motion a été présentée suite à la condamnation du parti populaire (PP) en tant que bénéficiaire d’un réseau de corruption. La motion a obtenu un vote positif de 180 voix contre 169 et une abstention. Ont voté pour la motion outre le parti socialiste, le parti de gauche radicale Podemos, le parti nationaliste basque (PNV) de centre droit, et les indépendantistes catalans de gauche et de droite.

Le Secrétaire général du PSO Pedro Sanchez a été chargé de former le nouveau gouvernement espagnol qui a prêté serment le 7 juin 2018 devant le Roi Felipe VI. Ce gouvernement qualifié comme « le meilleur de la société espagnole » présente l’originalité qu’il est formé de plus de femmes que d’hommes, et qu’il a donc dépassé la parité. Onze femmes ont été nommées à des départements importants. Outre la Vice-Présidente chargée également de l’égalité, ont été confiés à des femmes les ministères de l’économie, la justice, la défense, l’éducation, le travail, la santé, les finances, l’administration territoriale, l’environnement et l’énergie, ainsi que l’industrie et le commerce. Seulement six ministères ont été pris en charge par les hommes, dont Joseph Borrel aux Affaires étrangères, ancien Président du Parlement européen, et adversaire du mouvement d’indépendance de la Catalogne. A noter la nomination de l’astronaute espagnol Pedro Duque au ministère des sciences, de l’innovation et des universités. Outre le volet féminisme, le nouveau gouvernement espagnol se présente comme pro-européen et un antidote au populisme.

Le nouveau gouvernement espagnol aura à répondre à plusieurs défis politiques et économiques. Sur le plan politique, le défi le plus important consiste à rétablir le dialogue avec la Catalogne qui a connu ces derniers mois des événements graves mettant en cause l’unité de l’Espagne.

Sur le plan économique, ce nouveau gouvernement devra respecter les engagements européens en ramenant à 2,2% le déficit public pour l’année 2018. Sortie de la crise en 2004, l’économie espagnole croit de 3% par an, mais la richesse n’est pas bien repartie. D’où la nécessité pour ce gouvernement socialiste de lutter pour l’égalité et contre la pauvreté. Un autre défi concerne le taux de chômage qui reste à 16,7% le plus élevé d’Europe après la Grèce, alors que 26,8% des emplois relèvent de contrats de travail temporaires. Pour relever ces défis, le nouveau gouvernement espagnol est minoritaire et ne dispose que de 84 députés sur 350. D’où une marge de manœuvre faible pour assurer sa pérennité jusqu’aux élections législatives de 2020. Outre le parti populaire, ce gouvernement subira l’opposition du parti Cuidadanos du centre droit qui a voté contre la motion de censure.

En ce qui concerne les relations Maroco-Espagnoles, elles étaient bonnes sous le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy. Ce dernier s’est toujours opposé à toute mesure contraire aux intérêts du Maroc sur la question du Sahara. Il a bâti avec les responsables marocains une coopération exemplaire en matière de migration clandestine, et de lutte contre l’extrémisme et le terrorisme. Sur le plan économique, l’Espagne s’est hissée au premier rang en tant que partenaire commercial du Maroc, et 800 entreprises espagnoles exercent sur le territoire marocain, puisque un tiers des investissements espagnols en Afrique se font au Maroc. L’Espagne se place également en tant que deuxième fournisseur de touristes et de transferts des résidents marocains à l’étranger qui sont plus de 700.000 en Espagne. La coopération entre les deux pays est multidimensionnelle : politique, économique, sociale et culturelle. Les intérêts réciproques entre le Maroc et l’Espagne sont tellement importants qu’il est impensable à tout gouvernement de les modifier en profondeur. Notre diplomatie doit cependant accroître sa vigilance vis-à-vis de ce gouvernement socialiste allié au parti Podemos, dont les thèses sur la question du Sahara ne nous sont pas favorables.

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