Plan Trump pour le conflit israélo-palestinien
Un plan injuste et illégal
Par Jawad KERDOUDI Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)
Mardi 28 Janvier 2020 à la Maison Blanche, Donald Trump aux côtés de Benyamin Netannyahou a révélé son \"Plan de paix pour le Proche-orient\".
Avant d’analyser ce plan, il convient de rappeler son contenu. Tout d’abord, Jérusalem restera la capitale indivisible d’Israël. Le plan américain refuse le partage de la ville, et prévoit que les Palestiniens installent leur capitale dans une lointaine banlieue de la ville sainte, derrière la barrière de sécurité qui sépare les quartiers arabes du reste de la municipalité. De plus, le plan évoque le droit de prière aux juifs sur l’Esplanade des mosquées jusque là réservée aux musulmans. Les colonies israéliennes de Cisjordanie où se sont installés 400.000 colons seraient annexées à Israël. La vallée du Jourdain, large bande de terre stratégique à la frontière jordanienne passerait sous souveraineté israélienne.
La bande de Gaza, enclave palestinienne serait démilitarisée, le Hamas et le Jihad islamique devraient déposer les armes. Le plan refuse le droit de retour aux 5 millions de réfugiés palestiniens recensés par l’ONU à travers le monde. Les réfugiés palestiniens auront le choix entre aller dans le futur Etat palestinien, rester dans leur pays d’accueil, ou choisir un pays tiers. Les Etats-Unis ont cessé leur contribution à l’UNRWA organisme onusien qui s’occupe des réfugiés palestiniens. Pour que les Palestiniens puissent établir un Etat, d’autres conditions sont prévues par le plan américain. C’est ainsi qu’ils devraient se plier aux exigences sécuritaires israéliennes, s’interdire toute démarche devant les institutions internationales comme la Cour Pénale internationale, et adopter des lois de bonne gouvernance.
Le plan Trump pour le conflit israélo-palestinien présente de nombreuses défaillances. Tout d’abord il n’a pas été négocié avec les Palestiniens comme l’Accord d’Oslo de 1993. C’est plutôt un plan américano-israélien qui se présente comme un diktat aux Palestiniens. C’est un plan injuste et illégal qui fait la part belle à toutes les exigences d’Israël. Les Palestiniens et avec eux tous les Arabes et les Musulmans ont toujours revendiqué Jérusalem-Est comme capitale de l’Etat palestinien à la fois pour des raisons politiques et religieuses. L’ONU a tout de temps considéré que le sort de Jérusalem devrait être discuté entre Israéliens et Palestiniens. De plus, la Jordanie dispose depuis 1967 d’un "rôle spécial" sur les lieux de pèlerinage musulmans à Jérusalem. Les colonies israéliennes en Cisjordanie et à Jérusalem-Est n’ont jamais été reconnues par la communauté internationale, et l’ONU les considère comme illégales. Enfin le droit de retour des réfugiés a été constamment revendiqué par les Palestiniens dans toutes les précédentes négociations.
Comme il fallait s’y attendre les Palestiniens ont rejeté en bloc le plan américain, et Mahmoud Abbas a rompu toute relation avec les Etats-Unis et Israël. Un haut fonctionnaire de l’Autorité palestinienne a déploré que certains pays arabes du Golfe n’ont pas critiqué directement le plan, en indiquant qu’il s’agit d’une base de négociations. L’Iran a jugé que c’est un "Plan de paix de la honte" et la Turquie que c’est un projet mort-né. La Jordanie a estimé que l’établissement d’un Etat palestinien indépendant sur les frontières de 1967 reste "la seule voie pour une paix globale et durable". Le Maroc de son côté par la voix du Ministre des Affaires Etrangères a émis le " Souhait d’une solution réaliste à la question israélo-palestinienne, satisfaisant les droits légitimes du peuple palestinien pour un Etat indépendant viable et souverain avec Jérusalem-Est comme capitale". Enfin la Ligue arabe a également rejeté officiellement le plan de paix américain étant donné qu’il ne respecte pas les droits fondamentaux du peuple palestinien.
En conclusion, le plan Trump ne résout en rien le conflit israélo-palestinien, en donnant satisfaction à toutes les demandes d’Israël au détriment des Palestiniens. A contraire, il risque de provoquer des tensions graves entre Palestiniens et Israéliens et peut être une nouvelle «Intifada». Il ne reste pour le peuple palestinien que la lutte contre l’occupant israélien comme il le fait depuis 70 ans avec l’espoir que la justice finira par triompher.
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