DIALOGUE INTER-LIBYEN A BOUZNIKA
UN ESPOIR DE PAIX
Par Jawad KERDOUDI
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)
Ayant proclamé son indépendance en 1951, la Libye a subi un coup d’Etat militaire en 1969 qui a porté au pouvoir Mouammar Kadhafi. Ce dernier a gouverné le pays pendant 42 ans sous forme d’une dictature implacable. Dans le cadre du Printemps arabe en 2011, une rébellion s’est transformée rapidement en guerre civile. En invoquant la défense de la société civile, une résolution de l’ONU a donné le feu-vert à une intervention militaire franco-birtannique qui a abouti à la mort de Kadhafi le 20 Octobre 2011. La Libye est entrée alors dans une situation chaotique où les milices qui n’ont pas été désarmées se sont taillées des fiefs dans plusieurs régions du pays.
Alors que l’ONU à travers les représentants du Secrétaire Général Martin Kobler et Ghassan Salamé tentait en vain de trouver une solution au conflit libyen, sont apparus deux pouvoirs l’un à l’Est et l’autre à l’Ouest. A l’Est, le général Khalifa Haftar s’est installé dans la zone orientale depuis 2014 grâce à l’Armée de libération nationale (ANL) et a reçu le soutien de l’Egypte, de l’Arabie Saoudite, des Emirats Arabes Unis, de la Russie et plus discrètement de la France. Le Maroc a pris l’initiative de réunir à Skhirat les représentants du Congrès général national et de la Chambre des représentants qui a abouti à la signature d’un Accord le 17 Décembre 2015. Cet Accord prévoit la formation d’un gouvernement d’union nationale (GNA) dirigé par Fayez El Serraj qui a été reconnu par l’ONU et soutenu par la Turquie, Qatar, et la Jordanie. En Avril 2019 Haftar lance une offensive sur Tripoli mais qui n’a pas abouti à la conquête de la capitale.
Valeur aujourd’hui, la solution militaire voulue par Haftar n’a pas réussi, et toutes les tentatives de résolution du conflit libyen notamment par les rencontres de Paris et de Berlin ont échoué. C’est pourquoi le Maroc a de nouveau réagi en organisant du 6 au 10 Septembre 2020 un dialogue inter-libyen à Bouznika. Cette rencontre a réuni les représentants du Haut Conseil d’Etat émanant du gouvernement d’union nationale de Tripoli, et des députés du parlement de Tobrouk. Le ministre des Affaires étrangères Nasser Bourita a déclaré que le Maroc n’a pas d’agenda pour la Libye, que la solution du conflit ne peut être que politique, et a réclamé la fin des ingérences étrangères.
A l’issue des discussions qui ont duré cinq jours, le communiqué final publié le 10 Septembre 2020 indique que les parties libyennes sont parvenues à un accord global sur les critères et les mécanismes transparents et objectifs pour occuper les postes de souveraineté en Libye. Le communiqué appelle également l’ONU et la communauté internationale de soutenir les efforts du Maroc pour parvenir à une solution politique globale en Libye. Il a souligné l’approche marocaine basée sur la bonne foi et la non ingérence. Les deux délégations sont convenues de revenir au Maroc fin Septembre 2020 pour finaliser l’accord. La facilitation apportée par le Maroc pour le lancement du dialogue inter-libyen a été bien accueillie à l’échelle internationale notamment par l’ONU par la voix de Stéphanie Williams, Cheffe de la Mission par intérim en Libye. Plusieurs pays et organisations, telles que l’Union européenne, la Communauté des Etats Sahélo-sahariens, et la Ligue Arabe ont salué l’engagement constructif du Roi Mohammed VI à parvenir à une résolution pacifique du conflit en Libye.
En conclusion, on ne peut qu’espérer qu’il soit mis fin le plus rapidement possible au conflit qui sévit en Libye depuis 2011. Tout d’abord au profit du peuple libyen qui souffre de l’instabilité et du chaos qui s’est installé dans le pays. Ensuite pour la consolidation de ses institutions politiques et la stabilité de toute la région du Maghreb.
CHRONIQUES HEBDOMADAIRES DE l'IMRI