75ème anniversaire de l’Organisation des Nations Unies
Pour une réforme profonde de cette institution
Par Jawad KERDOUDI Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)
Rappelons que c’est le 26 Juin 1945 que la Charte des Nations-Unies a été signée à San Francisco, alors que la seconde guerre mondiale n’était pas encore terminée. Les promoteurs de cette institution ont assigné des objectifs ambitieux à cette nouvelle organisation. Le premier a été le maintien de la paix et la sécurité internationale, afin d’éviter une troisième guerre mondiale. Le second objectif est la protection des droits de l’homme notamment l’élimination de toute discrimination de genre et de race. Le troisième objectif est l’aide humanitaire et le développement durable afin de lutter contre la pauvreté dans le monde. Enfin le dernier objectif est la garantie du droit international afin d’éviter tout abus notamment des grandes puissances.
Au fur et à mesure, l’ONU s’est largement développée. Alors que les signataires de la Charte n’étaient que 51 lors de la création, l’ONU compte actuellement 193 Etats et dispose d’un système structuré comprenant six organes principaux dont l’Assemblée Générale, le Conseil de sécurité et le Conseil économique et social. Elle dispose de quinze Agences spécialisées dont les plus renommées sont la Banque mondiale, et le Fonds monétaire international, l’Organisation mondiale de la santé et l’UNESCO. Enfin cinq organisations apparentées, dont l’Agence Internationale de l’énergie atomique et l’Organisation mondiale du commerce.
Bine que l’ONU ait réalisé plusieurs objectifs, notamment à travers ses Agences spécialisées, elle souffre de plus en plus de critiques. Sa crédibilité est mise en cause dans le non respect des résolutions du Conseil de sécurité, notamment concernant le conflit israélo-palestinien. Le rôle des cinq membres permanents du Conseil de sécurité (Etats-Unis, Chine, France, Royaume-Uni, Russie) est lui aussi mis en cause.
La composition de ce Conseil de sécurité ne reflète plus la situation actuelle du monde, avec la montée des pays émergents tels que le Brésil, l’Inde et l’Afrique. Le droit de véto des cinq membres permanents est également critiqué. En son état, le droit de véto permet à tout membre permanent de bloquer toute résolution du Conseil de sécurité. L’utilisation du droit de véto par un membre permanent peut geler toute réponse armée ou diplomatique possible des Nations Unies face à une crise. Les Etats-Unis, la Russie et la Chine sont accusés d’avoir un « recours abusif » à leur droit de véto. D’où la nécessité d’une réforme de la composition du Conseil de sécurité soit en supprimant le statut de membre permanent et du droit de véto, soit en élargissant sa composition à d’autres pays. L’ONU nécessite une vaste réforme administrative allant de la délocalisation de certains services, au renforcement du système de passation des marchés, et à la diminution des dépenses. Ceci d’autant plus que l’Organisation a de plus en plus en difficulté pour assurer son financement.
La pandémie du Covid 19 déclenchée en Chine fin 2019 a aussi montré un manque d’actions multilatérales, chaque pays essayant de trouver des solutions sur le plan national. Aussi la Déclaration de l’Assemblée Générale à l’occasion du 75ème anniversaire de l’ONU a appelé à revigorer le multilatéralisme et à renforcer la coopération internationale. En effet, certains fléaux qui frappent l’humanité ne peuvent être résolus qu’à l’échelle internationale. On peut citer la préservation de la paix, la lutte contre les pandémies et le changement climatique, l’éradication de la pauvreté et des inégalités sociales, le combat contre la corruption et les discriminations.
En conclusion, l’Organisation des Nations Unies est unique, légitime, permet le rassemblement, dispose d’un pouvoir normatif et est l’espoir d’un monde meilleur. Il ne s’agit pas d’instituer un gouvernement mondial mais d’améliorer la gouvernance mondiale. C’est une institution indispensable pour faire face aux problèmes mondiaux. Pour améliorer son efficacité, elle a besoin d’une réforme profonde.
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