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La crise Libyenne :
Une lueur d’espoir

Par Jawad KERDOUDI
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)



En 2011, dans le cadre des mouvements de protestation dans les pays arabes, une rébellion éclate en Libye et se transforme en guerre civile. Avec le soutien d’une intervention militaire internationale, les rebelles renversent le régime de Kadhafi qui est exécuté le 20 Octobre 2011. La Libye s’avère depuis incapable de trouver la stabilité politique et de construire un Etat de droit. Une nouvelle guerre civile éclate en 2014 tandis que le gouvernement mis en place par les Nations Unies fait face à une rébellion dans l’Est du pays. Plusieurs conférences internationales ont eu lieu pour résoudre la crise libyenne afin d’assurer la stabilité en Afrique du Nord, réduire la dissémination des armes et le flux de migrants. Le Maroc a participé activement à ces initiatives en organisant les conférences de Skhirat en 2015 et de Bouznika en 2020. La position du Maroc peut être résumée en trois points : la solution ne peut être que libyenne, pacifique et politique.

Une lueur d’espoir pour une solution politique de la crise libyenne est née avec la signature le 23 Octobre 2020 à Genève d’un Accord pour un cessez-le-feu permanent. En effet, le pouvoir en Libye est partagé entre le Gouvernement d’union nationale (GNA) présidé par Fa?z Serraj qui siège à Tripoli et reconnu par l’ONU, et le gouvernement de Tobrouk instauré par l’ancien parlement dissident et son bras armé l’Armée nationale libyenne dirigé par le maréchal Khalifa Haftar. Dès la chute du régime de KadhafI, plusieurs pays étrangers se sont ingérés dans la crise libyenne fournissant des équipements militaires et des combattants armés y compris des mercenaires. La Turquie s’est alignée sur le GNA, tandis que la Russie, les Emirates Arabes Unis, et l’Egypte ont apporté leur soutien au maréchal Haftar. Ce dernier a lancé le 4 Avril 2019 une offensive sur Tripoli pour s’assurer le contrôle de tout le pays. Cependant devant la résistance acharnée de GNA, il a été obligé de cesser les hostilités en Juin 2020.
L’Accord du cessez-le-feu du 23 Octobre 2020 sous l’égide de Stéphanie Williams Emissaire par intérim de l’ONU en Libye, prévoit le retour des unités militaires dans leurs camps, ainsi que le départ de tous les mercenaires et combattants étrangers dans un délai de trois mois. Il prévoit également l’ouverture des voies terrestres reliant toutes les régions et les villes du pays, la mise en place de dispositifs de sécurité et l’augmentation de la production de pétrole. Le 2 Novembre 2020, les délégations militaires des deux camps se sont réunies à Ghadamès dans le Sud-Ouest de la Libye pour mettre en œuvre l’Accord de cessez-le-feu du 23 Octobre 2020. L’ONU, l’Union européenne et plusieurs pays européens ont salué la conclusion de l’Accord comme une étape fondamentale vers la paix et la stabilité de la Libye. Par contre, la Turquie a critiqué l’Accord en soulignant qu’il n’a pas été conclu au plus haut niveau et qu’il manque de crédibilité.
Suite à l’Accord de cessez-le-feu a eu lieu à Tunis sous l’égide de l’ONU du 9 au 13 Novembre 2020 le Forum de dialogue politique libyen. Ont participé à ce Forum 75 délégués libyens sélectionnées par l’ONU selon des critères géographiques, politiques et idéologiques. Parmi les 75 délégués réunis à Tunis se trouvent 13 représentants du Haut Conseil d’Etat basé à Tripoli, et 13 représentants du Parlement élu dont le président soutient le maréchal Haftar. Le Forum a décidé l’organisation d’élections présidentielles et parlementaires le 24 Décembre 2021. Ces élections doivent être libres, justes, inclusives et crédibles. Pour préparer ces élections il a été décidé de créer un nouveau Conseil présidentiel et un gouvernement d’union nationale par intérim.
En conclusion, on ne peut que se réjouir de l’Accord de cessez-le-feu signé le 23 Octobre 2020 et la feuille de route adoptée par le Forum de Tunis le 13 Novembre 2020 qui prévoit la création d’un nouvel exécutif pour préparer les élections du 24 Décembre 2021. Ceci d’autant plus qu’on note un réveil de la société civile libyenne qui a organisé dans plusieurs villes en Tripolitaine comme en Cyrénaïque des mouvements de protestation exprimant le ras-le-bol de la population face à la dégradation de ses conditions de vie. L’ONU qui est en charge du dossier libyen doit être ferme pour éviter deux écueils qui risquent de faire obstacle à la résolution définitive de la crise libyenne. Il s’agit des dirigeants libyens élus qui n’ont pas été représentés au Forum de Tunis, et qui peuvent mettre en doute la légitimé des décisions prises par ce Forum. L’autre risque est celui des pays étrangers qui ont intervenu dans la crise libyenne (Turquie, Russie, Emirates Arabes unis, Egypte) et qui poursuivent leurs intérêts propres soit politiques soit économiques. Les pays Maghrébins doivent rester très vigilants vis-à-vis de la crise libyenne, car la Libye est un pays voisin et membre de l’Union du Maghreb Arabe (UMA).

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