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Le New deal du Président Biden
Retour à l’Etat providence

Par Jawad KERDOUDI
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)

Lors de son discours devant le Congrès le 28 Avril 2021, le Président Biden a lancé son programme à court et moyen terme, que plusieurs observateurs ont qualifié de « New deal ». Le terme « New Deal » a été utilisé pour la première fois par Franklin Roosvelt après la crise économique de 1929. S’inspirant de l’Economiste Keynes, Roosvelt a considérablement stimulé la demande par des dépenses publiques d’investissements dans les infrastructures ainsi que sur le plan social. Le but était d’utiliser la politique budgétaire pour stimuler l’économie. Le même processus a été utilisé par le Président Clinton durant la récession des années 1990, et par Barack Obama après la crise des subprimes en 2007-2008. Le New Deal est une entorse au « Consensus de Washington » qui prône la réduction des déficits publics, la diminution des impôts, la libéralisation de l’économie, l’encouragement des IDE, et la privatisation des entreprises publiques. Ce néolibéralisme a été notamment mis en œuvre au Royaume-Uni par Madame Tatcher et aux Etats-Unis par le Président Reagan. S’il a donné quelques résultats positifs, le néolibéralisme a accentué les inégalités sociales et notamment l’affaiblissement de la classe moyenne. L’actuelle pandémie de la Covid-19 a mis en exergue partout dans le monde le fossé entre les nantis et les démunis, et la grande précarité d’un pourcentage important de la population.

Le Président Biden qui a certainement voulu donner satisfaction à l’aide gauche de son parti, a indiqué que la théorie du ruissellement n’a jamais fonctionné, et qu’il faut faire croître l’économie par le bas et le milieu et non par le haut. Il a proposé au Congrès un Plan de 2.000 milliards de dollars pour rénover les infrastructures, mettre l’économie au vert, et réduire les inégalités sociales. A plus long terme et s’il est réélu en 2025, il souhaite porter les dépenses publiques à 6.500 milliards de dollars d’ici 2030.
Le tiers de cette somme serait réservé aux investissements dans le cadre de la transition énergétique. Contrairement à Donald Trump qui ne croyait pas au changement climatique, le Président Biden a réintégré les Etats-Unis dans l’Accord de Paris sur le climat de 2015. Il a organisé les 22 et 23 Avril 2021 dernier un Sommet sur le climat. Il a annoncé à cette occasion la réduction de 50% des émissions de gaz à effet de serre aux Etats-Unis d’ici 2030 par rapport à 2005. Il a indiqué également la neutralité carbone des Etats-Unis d’ici 2050. Le deuxième tiers du plan de 6500 milliards de dollars serait consacré au département de la santé. Les mesures prévues tendent à renforcer l’Obamacare qui est une loi promulguée par Barack Obama en 2010. Cette loi avait permis de garantir la couverture de santé à 32 millions d’Américains qui en étaient dépourvus. Le but final est d’assurer une couverture maladie à toutes les familles. Le troisième tiers du plan serait consacré à l’éducation. Les dispositions principales concernent les quartiers défavorisés, l’accueil des enfants à l’école dès l’âge de 3 ans, la gratuité dans certaines Universités, le réaménagement des crédits accordés aux étudiants, et le congé parental de 12 semaines.
Une autre mesure proposée par le Président Biden est de doubler le salaire minimum en le portant à 15 dollars l’heure. Sur la base de 8 heures de travail par jour, et 20 jours de travail par mois, cela correspond à un salaire mensuel de 24.000 Dh/mois. Afin de financer ce programme très ambitieux, il est prévu d’augmenter les impôts sur les entreprises et sur les personnes physiques. Le taux d’imposition pour les foyers gagnant plus d’un million de dollars par an passerait de 20% à 39,6%. L’impôt sur les sociétés passerait de 21% à 28%, et le prélèvement sur les filiales étrangères doublerait pour atteindre 21%. Pour être effective, cette réforme fiscale doit être adoptée par le Congrès où le parti démocrate n’a qu’une faible majorité à la Chambre des Représentants, alors qu’il est à égalité avec les Républicains au Sénat.
En conclusion, le néolibéralisme a atteint ses limites qui sont apparues de façon éclatante pendant la pandémie de la Covid-19 que nous vivons depuis plus d’un an. Il n’est plus tolérable d’accepter le fossé grandissant entre les nantis et les démunis. Les Etats-Unis qui sont le symbole du capitalisme donnent l’exemple grâce au Président Biden qui a priorisé le volet social, notamment l’éducation et la santé. Notre pays le Maroc a fait un premier pas avec la mise en œuvre du projet de généralisation de la protection sociale. D’autres mesures doivent être prises dans le cadre du nouveau modèle de développement en cours d’examen.

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