Sahara marocain
Double victoire diplomatique avec l’Allemagne et l’Espagne
Par Jawad KERDOUDI Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)
Le Maroc ayant repris ses Provinces du Sud en 1975, lutte depuis cette dernière date pour la reconnaissance internationale de sa souveraineté sur ce territoire. Ses principaux adversaires sont le mouvement séparatiste Polisario, et son protecteur l’Algérie qui lui prodigue un soutien diplomatique, financier et matériel.
Après des efforts incommensurables, les Etats-Unis ont reconnu le 10 Décembre 2020 la marocanité du Sahara dans le cadre de l’Accord d’Abraham. L’Allemagne a accueilli négativement cette décision, et son ambassadeur à New York a demandé le 24 Décembre 2020 la réunion du Conseil de sécurité de l’ONU pour examiner la position américaine sur le Sahara. De plus le 19 Janvier 2020, l’Allemagne avait organisé à Berlin une conférence sur la Libye sans inviter le Maroc, qui s’est impliqué activement pour trouver une solution à la crise libyenne. Enfin le 27 Janvier 2021, le Parlement régional de Brême a hissé le drapeau du Polisario au haut de son bâtiment. Le Maroc a protesté vivement auprès des autorités allemandes pour ce positionnement négatif vis-à-vis de la question du Sahara. Sans réaction du gouvernement allemand, les autorités marocaines ont interdit le 1er Décembre 2021 toute relation avec l’ambassade d’Allemagne à Rabat, tandis que l’Ambassadrice du Maroc à Berlin a été rappelée pour consultation. L’action ferme des autorités marocaines sous l’égide du Roi Mohammed VI a donné ses fruits. En effet le 5 Janvier 2022, le Président allemand Frank-Walter Steinmeier a envoyé un message au souverain marocain, indiquant que l’initiative d’autonomie sous souveraineté marocaine présentée par le Maroc à l’ONU en 2007 est une bonne base pour la résolution de la question du Sahara. Il a salué les vastes réformes menées par le Maroc sous la conduite du Roi Mohammed VI, ainsi que l’engagement actif du Maroc pour le processus de paix en Libye. Il a réaffirmé le soutien continu de l’Allemagne au développement du Maroc, qui constitue un site d’investissements important pour les entreprises allemandes en Afrique.
Un processus similaire est intervenu auprès de l’Espagne, ancienne puissance administrative du Sahara. Depuis 1975, Madrid a plutôt pris position pour le Polisario avec la bénédiction de l’Algérie. Mais la goutte qui a fait déborder le vase a eu lieu le 18 Avril 2021, lorsque le gouvernement espagnol présidé par le socialiste Pedro Sanchez, a accueilli en Espagne pour des soins médicaux Brahim Ghali Chef des séparatistes. Le déplacement entre l’Algérie et l’Espagne s’est accompli avec un faux passeport et une identité usurpée de Brahim Ghali, qui en outre était poursuivi par la justice espagnole pour des actes criminels. Le Maroc là encore a protesté vivement auprès de Madrid, et a riposté le 17 Mai 2021 en desserrant le contrôle des migrants à destination de Ceuta. A l’instar de ce qui a été fait par l’Allemagne, le gouvernement marocain a interdit toute relation avec l’ambassade d’Espagne à Rabat, et a rappelé son ambassadrice à Madrid pour consultation. Afin de calmer la tension entre les deux pays, le gouvernement espagnol a révoqué lors d’un remaniement ministériel la ministre des affaires étrangères Arancha González Laya, considérée à tort ou à raison comme la principale responsable de l’accueil de Brahim Ghali en Espagne. Cette décision n’a pas suffit au Maroc qui n’a pas rétabli des relations normales avec l’Espagne. Il faut attendre le 18 Mars 2022, lorsque le Président du gouvernement espagnol Pedro Sanchez a envoyé un message au Roi Mohammed VI. Ce message reconnait l’importance de la question du Sahara pour le Maroc, et considère l’initiative marocaine d’autonomie présentée en 2007 par le Maroc à l’ONU, comme la base la plus sérieuse, réaliste, et crédible pour la résolution du conflit. Pedro Sanchez ajoute dans son message qu’il souhaite une nouvelle relation avec le Maroc, basée sur la transparence et la communication permanente, le respect mutuel des accords signés entre les deux parties, et l’abstention de toute action unilatérale. Le lendemain de ce message, l’Algérie a rappelé son Ambassadeur à Madrid.
En conclusion, on ne peut que se féliciter de cette double victoire concernant la récupération des Provinces du Sud. Elle s’ajoute aux succès antérieurs : reconnaissance de la marocanité du Sahara par les Etats-Unis, installation de 21 Consulats généraux à Dakhla et Laâyoune, pas de mention du référendum dans la dernière résolution du Conseil de sécurité en date du 29 Octobre 2021, qui recommande la poursuite des Tables rondes aux quatre parties : Algérie, Maroc, Mauritanie, Polisario. La prochaine étape devrait être la reconnaissance du Plan d’autonomie par l’Union européenne, puisque trois pays membres parmi les plus importants : Allemagne, France, Espagne l’ont déjà fait. A cet égard, il faut solliciter le Président Emmanuel Macron qui préside également le Conseil de l’Union européenne jusqu’au 30 Juin 2022. Enfin si l’Algérie refuse de s’adjoindre aux Tables rondes sous l’égide de l’ONU, et afin de résoudre définitivement ce problème du Sahara, il faut que les institutions et les pays qui sont favorables au Plan d’autonomie passent à l’étape ultime, à savoir la reconnaissance officielle de la marocanité du Sahara.
CHRONIQUES HEBDOMADAIRES DE l'IMRI