Maroc – Amérique latine,
Quelle stratégie diplomatique adopter .
Question à M. Jawad Kerdoudi pour le compte du Journal « L’Opinion »
-Quelle est votre lecture de la victoire du nouveau président colombien de gauche qui vient de manifester sa sympathie pour le polisario ?
-Où en sommes-nous dans la bataille diplomatique sur le front de l’Amérique Latine ?
-Faut-il s’inquiéter de la vaque gauchiste qui submerge l’Amérique Latine sachant que même le Brésil, plus grand pays de la région peut basculer à gauche en cas de victoire Lula Da Silva ?
-Peut-on dire que la diplomatie économique soit en mesure de changer la perception des pays latino-américains du conflit du Sahara ?
-Quelle est votre lecture de la victoire du nouveau président colombien de gauche qui vient de manifester sa sympathie pour le polisario ?
1) La reconnaissance par la Colombie de la "RASD" le 7 aout 2022 est une mauvaise nouvelle pour le Maroc. Elle s'explique par la victoire aux Elections présidentielles de Gustavo Petro, ancien guérillero du mouvement du 19 Avril socialo-bolivarien. Il 'agit d'une décision dictée par une idé ologie de gauche qui s'appuie sur "le droit des peuples de disposer d'eux-memes". Ce principe ne s'applique pas au Sahara qui a toujours été peuplée par une population authentiquement marocaine.
-Où en sommes-nous dans la bataille diplomatique sur le front de l’Amérique Latine ?
2) Il faut reconnaitre que la bataille diplomatique marocaine sur le front de l'Amérique latine n'a pris son essor que depuis une vingtaine d'années. Elle a laissé la place au Polisario, dont les membres parlent courrament l'espagnol, et qui ont convaincu plusieurs pays de la région de reconnaitre la "Rasd". L'offensive marocaine a commencé en 2004 par la visite Royale dans plusieurs pays latino-américains, qui a mis l'accent sur le role du Maroc et son leadership dans la
consolidation des relations entre l'Afrique et l'Amérique latine. Le Maroc a en outre ouvert plusieurs ambassades en Amérique centrale et du Sud. Le ministre marocain des affaires étrangères a effectué des visites à la quasi-totalité des pays de l'Amérique latine pour développer la coopération Sud/Sud et expliquer la position marocaine sur son Sahara. Le Parlement marocain n'a pas été en reste, puisqu'il a reçu plusieurs missions parlementaires d'Amérique latine, et effectué de multiples visites dans la région. C'est ainsi qu'il a organisé le Forum parlementaire Afro-Latino-Américain en 2019 à Rabat. En outre, le Parlement marocain est membre ou observateur de plusieurs Assemblées parlementaires d'Amérique latine. De son côté la société civile marocaine, dans la mesure de ses moyens, a entamé des relations avec les Centres de réflexion et les Universités de l'Amérique latine, qu'il faut approfondir. Tous ces efforts ont porté leurs fruits, puisqu'il ne reste qu'une dizaine de pays latino-américains qui continuent des relations avec les séparatistes.
-Faut-il s’inquiéter de la vaque gauchiste qui submerge l’Amérique Latine sachant que même le Brésil, plus grand pays de la région peut basculer à gauche en cas de victoire Lula Da Silva ?
3) En effet, on assiste à une vague gauchiste qui déferle sur l'Amérique latine. Outre la Colombie avec l'élection à la présidence de Gustavo Petro, le Pérou avec Pedro Castillo, le Chili avec Gabriel Boric, il se peut que Luna Da Silva revienne au pouvoir aux élections présidentielles brésiliennes en Octobre prochain. Cette vague s'explique par les régimes de droite qui étaient au pouvoir, et qui n'ont pas amélioré le pouvoir d'achat des citoyensles plus pauvres, accroissant les inégalités. La diplomatie marocaine doit multiplier ses efforts pour expliquer les réformes sociales entreprises par le Maroc, notamment la couverture sanitaire universelle.
-Peut-on dire que la diplomatie économique soit en mesure de changer la perception des pays latino-américains du conflit du Sahara ?
4) Le Maroc doit jouer plusieurs cartes. D'abord l'économie en augmentant les échanges commerciaux et les investissements avec ces pays. Le Maroc peut apporter une coorpération efficace dans plusieurs domaines : l'agriculture, la gestion de l'eau, les énergies renouvelables, l'industrie comme l'automobile et l'aéronautique, le tourisme, les nouvelles technologies. Le Maroc dispose également d'un grand potentiel en phosphates et engrais, indispensables pour
l'amélioration des rendements afin de parvenir à la sécurité alimentaire. Outre l'économie, le Maroc doit développer les échanges culturels avec les pays d'Amérique latine, ainsi que l'apprentissage de la langue espagnole, notamment pour les diplomates marocains affectés dans cette région.
En conclusion, on peut rester optimiste sur la question du Sahara. Les Etats-Unis ont reconnu officiellement la marocanité du Sahara. La France, l'Allemagne, et surtout l'Espagne ancien colonisateur, ont apporté leur soutien au Plan d'autonomie présenté par le Maroc à l'ONU en 2007. Au Conseil de Sécurité, on peut compter sur le soutien des Etats-Unis, de la France, du Royaume-Uni, ainsi que celui de la Chine qui a reçu tout récemment l'appui à son intégrité territoriale vis-à -vis de Taiwan par notre Ambassadeur à Pékin. La Russie a également apprécié l'absence de vote du Maroc à la résolution de l'Assemblée générale de l'ONU du 2 Mars 2022 suite au déclenchement de la guerre en Ukraine. Cependant, le Maroc avec toutes ses composantes doit rester vigilant car la bataille n'est pas encore gagnée.
CHRONIQUES HEBDOMADAIRES DE l'IMRI