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Election présidentielle américaine
Biden ou Trump ?

Par Jawad KERDOUDI
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)

L’élection présidentielle américaine aura lieu le 5 novembre 2024. Rappelons que l’élection du président et du vice-président américains s’effectuera par un scrutin indirect. En effet, ce seront les 538 membres du collège électoral appelés « Grands électeurs » qui désigneront le président et le vice-président avec une majorité absolue de 270 membres. Le nombre des grands électeurs est déterminé pour chaque Etat selon principalement sa démographie. Dans tous les Etats américains, sauf le Maine et le Nebraska, la majorité simple au scrutin uninominal majoritaire à un tour, suffit pour remporter la totalité des grands électeurs.
La Constitution américaine prévoit un mandat présidentiel de quatre ans renouvelable une fois, soit d’une façon consécutive soit d’une façon discontinue. Joe Biden et Donald Trump n’ayant effectué qu’un seul mandat, ils sont habilités à être candidat pour la présidence. D’ailleurs le 25 avril 2023 Joe Biden a annoncé sa candidature au nom du parti démocrate, et le 15 novembre 2022 Donald Trump avait également annoncé sa candidature au nom du parti républicain. Cependant la Cour suprême du Colorado a annoncé que Donald Trump est inéligible, du fait de sa responsabilité dans l’assaut du Capitole le 6 janvier 2021. Le 28 décembre 2023, ce fût l’Etat du Maine qui a annoncé à son tour l’inéligibilité de Donald Trump pour la même raison. Donald Trump a saisi la Cour suprême fédérale qui se prononcera sur son inéligibilité le 8 février 2024.

Sous réserve de l’arrêt de la Cour suprême fédérale, il est fort possible que les deux candidats à l’élection présidentielle américaine de novembre 2024 seront Joe Biden et Donald Trump. En effet, les sondages effectués par plusieurs Instituts spécialés, indiquent que Biden et Trump se détachent des autres candidats démocrates et républicains. C’est ainsi que Joe Biden a lancé une attaque frontale le vendredi 5 janvier 2024 contre son rival Donald Trump, l’accusant d’utiliser la rhétorique de l’Allemagne nazie. Presque trois ans après l’assaut du Capitole, le président démocrate a présenté l’élection comme un choix entre un homme « obsédé par le passé et par ses propres intérêts, et lui-même qui représente la démocratie et l’avenir de l’Amérique ». Il a ajouté que Donald Trump « est prêt à sacrifier notre démocratie afin d’obtenir le pouvoir et qu’il parle du sang des Américains qui est empoisonné », utilisant le même langage que celui utilisé dans l’Allemagne nazie. Joe Biden a évoqué également l’attaque du Capitole le 6 janvier 2021 « Un jour gravé dans notre mémoire, parce que c’est ce jour-là que nous avons failli perdre l’Amérique ». Il a ajouté que Trump et ses partisans " Maga" (Make America Great Again) non seulement cautionnent la violence politique mais ils en rient ».
Le samedi 6 Janvier 2024 Donald Trump a répondu aux attaques lancées par Joe Biden, qu’il qualifie comme un « incompétent » et un « corrompu », et le « pire président de l’histoire du pays ». Il a ajouté que les Etats-Unis sont actuellement en déclin à cause du mandat de Joe Biden, et que si celui-ci est réélu, le pays risque alors d’être entrainé dans une troisième guerre mondiale, ou une dépression comme celle de 1929. Donald Trump s’est autoproclamé comme « le seul candidat capable de sauver l’Amérique de chaque catastrophe de Biden ». Il n’a pas hésité à se moquer de Biden en mettant en évidence son âge (81 ans) et ses oublis pendant ses discours. Malgré toutes les poursuites judicaires qui le concernent, Donald Trump reste en tête des primaires républicains avec plus de 60% de voix.

Nous sommes à dix mois de l’élection présidentielle américaine en novembre 2024. Beaucoup d’événements peuvent se produire aux Etats-Unis d’ici là. Si se confirme la candidature Joe Biden et celle de Donald Trump, il y a un risque du retour au pouvoir de Donald Trump. Ce dernier n’a pas changé par rapport à son premier mandat avec ses deux slogans « America First » et « Make America Great Again ». Rappelons qu’il avait retiré les Etats-Unis de l’Accord de Paris sur le changement climatique, et de l’Organisation mondiale de la santé. Il avait mis en œuvre une guerre commerciale avec la Chine qui a déstabilisé le commerce mondial. Il avait également retiré les Etats-Unis de l’Accord du nucléaire iranien, ce qui a poussé l’Iran à progresser pour acquérir la bombe atomique. Ses deux entrevues avec le leader de la Corée du Nord Kim Jong-un en juin 2018 et février 2019 n’ont abouti à aucun résultat concret. Il avait reconnu Juan Guaido comme président par intérim du Venezuela, mais finalement Maduro est resté au pouvoir. Il avait enfin montré peu d’intérêt à l’OTAN, en demandant aux membres de cette organisation de consacrer au moins 2% du PIB pour leur budget militaire, et avait même mis en cause l’Article 5 du Traité de l’OTAN, qui impose à cette dernière de répondre militairement si un membre est attaqué. Pour son second mandat s’il est réélu, il est probable qu’il trouvera un arrangement avec Poutine au détriment de l’Ukraine, tout en réduisant ou en supprimant l’aide militaire et financière à ce dernier pays. Il soutiendra plus fortement Israël dans la guerre de Gaza, au détriment des Palestiniens. Il est possible qu’il reprenne une guerre commerciale contre la Chine, en durcissant la politique des Etats-Unis vis-à-vis de Taïwan et de la Corée du Nord. Par contre en ce qui concerne notre pays le Maroc, c’est Donald Trump qui a reconnu la marocanité du Sahara le 10 décembre 2020.

Le président Biden n’a pas remis en cause cette décision, et a adopté une politique sage et rationnelle durant les trois premières années de son mandat (2021-2023). C’est ainsi que sur le plan économique l’année 2023 s’est terminée aux Etats-Unis avec une croissance de 2,4% du PIB, un chômage de 3,5% et une inflation de 4,5%. Au niveau de la politique étrangère, il s’est rapproché de l’Europe tout en restant vigilant vis-à-vis de la Chine. Il a accordé une large aide financière et militaire à l’Ukraine en guerre contre la Russie. En ce qui concerne la guerre à Gaza il a incité Israël à la retenue pour préserver la vie des civils palestiniens. Cependant, sous la pression du puissant lobby israélien aux Etats-Unis, et en prévision de l’élection présidentielle de novembre 2024, il a accordé une aide financière et militaire à Israël, et les Etats-Unis n’ont pas voté le cessez-le-feu à Gaza lors du Conseil de sécurité de l’ONU du 8 décembre 2023.
En conclusion, les relations du Maroc avec les Etats-Unis resteront bonnes tant avec l’Administration Biden que celle de Trump. Si Trump est réélu il faut s’attendre à des relations internationales tumultueuses pendant son second mandat.

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