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Sommet de l’Union africaine à Addis-Abeba
Quel rĂ´le pour le Maroc ?

Par Jawad KERDOUDI
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)

Le 38ème Sommet de l’Union africaine s’est tenu les 15 et 16 Février 2025 à Addis-Abeba. L’ordre du jour de ce Sommet était très chargé. Ont été discutées en effet les questions de paix et de sécurité, notamment la guerre au Soudan et à l’Est de la République démocratique du Congo, ainsi que la poursuite du terrorisme au Sahel. C’était aussi l’occasion d’actualiser le Rapport « Faire taire les armes pour mettre fin aux conflits armés d’ici 2030 ». D’autres sujets ont été traités, tels que le rôle de l’Union africaine qui a été admise en tant que membre permanent au G20, la réforme du Conseil de sécurité de l’ONU, l’avancement de la ZLECAF. Le Sommet a abordé également le changement climatique, le financement du développement, la justice sociale, et les réformes internes à l’Union. Un autre dossier qui était le thème du Sommet a fait son apparition, à savoir les réparations liées à l’esclavage et au colonialisme, sous forme de reconnaissance officielle et des compensations financières pour les injustices du passé.

Une première confrontation Rabat-Alger a eu lieu dans le cadre du Conseil exécutif le Mercredi 12 Février 2025 pour l’élection d’un poste au Conseil de Paix et de Sécurité. L’Algérie a brigué ce poste, ainsi que le Maroc qui a occupé ce poste pendant trois ans. La candidature du Maroc avait en fait pour but de bloquer son voisin de l’Est. Le Lobbying des deux côtés a conduit au report de l’élection, aucun des deux pays n’a réussi à obtenir la majorité des deux tiers, laissant vacant le poste réservé à l’Afrique du Nord.

Le 38ème Sommet de l’UA a procédé également à d’autres élections. Ce fût d’abord la présidence tournante de l’Union africaine, où le chef de l’Etat angolais João Lourenço a remplacé le président mauritanien pour un mandat d’un an. L’Angola est le deuxième producteur de pétrole en Afrique après le Nigeria. Lourenço a pris le pouvoir en Angola en 2017, et avait reçu le président Biden en Décembre 2024, et a été lui-même reçu à Paris en Janvier 2025. Il a joué le rôle de médiateur en Centrafrique où il est parvenu en 2021 à un accord de paix entre les groupes armés et le président Touadéra. Il a également joué un rôle de médiateur dans le conflit Congo-Rwanda en obtenant un cessez-le-feu en Août 2024. Enfin, il a maintenu de bonnes relations tant avec les grandes puissances qu’avec les pays émergents. Il aura fort à faire en tant que Président de l’Union africaine, en prise avec plusieurs conflits armés sur le continent, et de nombreux problèmes politiques et économiques.

Une autre élection importante concerne la présidence de la Commission africaine pour remplacer le Tchadien Moussa Faki Mahamat qui a terminé son second mandat. Trois candidats étaient en lice : le Kenyan Raila Odinga, le Malgache Richard Randriamandrato, et le candidat de Djibouti Mahamoud Ali Youssouf. Au premier tour c’était le Kenyan Raila Odinga qui était en tête, puis le candidat de Djibouti est progressivement remonté, bénéficiant du report des voix du candidat malgache. Mahamoud Ali Youssouf ministre des affaires étrangères de Djibouti est connu pour sa compétence, sa maitrise des dossiers et sa connaissance de l’institution. Il a été soutenu par le Maroc face au candidat Kenyan Raila Odinga soutenu par l’Algérie.

Une troisième élection a concerné la Vice-Présidente de la Commission africaine, trois candidates se sont présentées : la Marocaine Latifa Akharbach, l’Egyptienne Hanane Morsy, et l’Algérienne Selma Haddadi. Ce fût cette dernière qui a été élue avec 33 voix après un scrutin intense. Selma Haddadi est présente à Addis Abeba depuis Août 2024 en tant qu’Ambassadrice de l’Algérie en Ethiopie, mais aussi Représentante permanente auprès de l’Union africaine.
Notre pays le Maroc a une longue histoire avec l’institution africaine Membre fondateur de l’OUA (Organisation de l’Union Africaine) en1963, il s’est retiré de cette organisation en 1984, suite à l’admission illégale de la « RASD », soutenue fortement par l’Algérie. Il fait son retour à l’Union africaine le 30 Janvier 2017. L’ordre du jour du Sommet de 2025 est caractérisé par l’absence de la question du Sahara marocain, en vertu de la décision 693 du Sommet de Nouakchott, qui reconnait l’exclusivité des Nations Unies dans la résolution de la question du Sahara marocain. La délégation marocaine a pris part à la réunion du Conseil Paix et Sécurité (CPS) sur la situation au Soudan et la crise à l’Est de la RDC. Elle a proposé d’observer une trêve humanitaire au Soudan durant le mois sacré du Ramadan, qui a été endossée à l’unanimité par le CPS. Le Maroc a également pris part à la réunion sur le financement de la santé, lors de laquelle il a annoncé une contribution substantielle. L’Union africaine a désigné en 2018 le Roi Mohammed VI en tant que Leader sur la question de la migration, et a choisi Rabat pour abriter l’Observatoire africain pour les migrations. Le Maroc contribue également à construire un modèle africain de résilience climatique notamment lors du Sommet africain par l’Action lancé en 2016. Les pays africains ont élu le Maroc comme membre du Conseil de Paix et de Sécurité au titre de deux mandats 2018-2020 et 2022-2025. En outre, la Déclaration de Tanger a été endossée à l’unanimité par la Conférence de l’UA, et a redynamisé l’approche nexus paix-sécurité-développement. Par ailleurs, le Maroc a mis en place un programme de formation spécialisé pour les observateurs électoraux de l’UA, en vue de promouvoir le processus démocratique sur le continent africain. Enfin le Maroc a réussi à faire nommer le Marocain Fathallah Sijelmassi en tant que Directeur général de la Commission de l’Union africaine.

En conclusion, le Maroc depuis son retour à l’Union africaine en 2017 a été particulièrement actif dans plusieurs domaines au sein de l’Union africaine. Cependant il y a lieu d’amplifier davantage notre action, comme l’a souligné Sa Majesté le Roi Mohammed VI dans son discours au Parlement du 11 Octobre 2024 : « Il faut mutualiser les efforts de toutes les institutions et les instances nationales officielles, partisanes et civiles ». En effet l’Algérie, adversaire principale de notre intégrité territoriale ne désarme pas. C’est ainsi qu’elle a réussi à faire élire la candidate algérienne Selma Haddadi à la Vice-présidence de la Commission africaine.
Cependant, le Maroc peut compter sur l’appui du nouveau Président de la Commission africaine le Djiboutien Mahamoud Ali Youssouf, car Djibouti a soutenu en 2022 le Plan d’autonomie du Sahara présenté par le Maroc à l’ONU, et a ouvert un Consulat à Dakhla.

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