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L’économie verte
Quel avenir au Maroc ?

Par Jawad Kerdoudi
Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)

La Conférence de Copenhague sur le changement climatique entame sa deuxième semaine de négociations avec des résultats mitigés. Une proposition de Danemark a été refusée par les pays en développement, qui ont fait une contre-proposition émanant du Groupe Basic (Brésil, Afrique du Sud, Soudan, Inde, Chine). Cette dernière proposition stipule que pour les pays en voie de développement, la priorité est le développement économique et l’éradication de la pauvreté. Elle souhaite que le Protocole de Kyoto reste en vigueur au-delà de 2012, avec l’intégration des Etats-Unis qui doivent opérer des réductions drastiques d’émissions de gaz à effet de serre. Les pays en voie de développement sont prêts également à prendre des engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais dans le cadre d’une certaine souplesse, et sans contrôle d’une institution internationale. Ils exigent en contrepartie la création d’un Fonds global du climat, financé par les pays développés (en dehors de la

Les négociations de Copenhague ont pour but de promouvoir l’économie verte dans le monde, c’est à dire une économie dépourvue de carbone. En effet, les scientifiques ont démontré que le réchauffement climatique de la planète, avec toutes ses conséquences désastreuses, est dû à l’émission de gaz à effet de serre provenant de la combustion sur la terre des énergies fossiles : pétrole, gaz et charbon. Pour enrayer ce réchauffement de la planète, il est nécessaire de réduire impérativement l’usage des énergies fossiles. Cela peut se faire de deux façons : l’efficacité énergétique, c'est-à-dire consommer moins d’énergie, et l’utilisation d’énergies renouvelables à savoir principalement l’énergie solaire, éolienne, et la biomasse (ensemble des matières organiques pouvant devenir des sources d’énergie). Cette diversification des sources d’énergie est d’autant plus nécessaire que les énergies fossiles sont rares et coûtent de plus en plus cher (le baril de pétrole a atteint 140 $ en Juillet 2008).



Notre pays le Maroc n’échappe pas à cette problématique, d’autant qu’il est dépendant des importations à hauteur de 97,3 % pour couvrir ses besoins énergétiques, principalement de pétrole et charbon. La facture énergétique lui a couté 70 milliards de dirhams en 2008, dont 85% pour le pétrole. En sus, afin de sauvegarder le pouvoir d’achat des consommateurs, la Caisse de Compensation à financé les produits pétroliers à hauteur de 23 milliards de dirhams. Devant cette situation très préjudiciable, les autorités ont pris à bras le corps ce phénomène en instaurant un plan national d’efficacité énergétique, en promulguant une loi sur les énergies renouvelables et en lançant un programme solaire ambitieux.



Le plan national d’efficacité énergétique vise principalement à réduire la consommation d’électricité et de pétrole. Pour l’électricité, l’objectif est de réaliser une économie de 15% de la consommation d’ici 2020 par les principaux utilisateurs : l’industrie, les ménages, le bâtiment. Pour l’industrie, le plan prévoit les audits énergétiques, la formation de techniciens spécialisés, l’instauration d’indicateurs pour mesurer les performances énergétiques des équipements. Il prévoit également une tarification incitative, des contrats-programme avec les distributeurs, l’équipement en batteries de condensateurs pour réduire les pertes en ligne, et le renforcement de la maintenance. Pour les ménages, le plan prévoit une plus grande utilisation des lampes à basse consommation (22 millions de lampes seront installées), ainsi que des équipements ménagers non consommateurs d’électricité (chauffe-eau solaires). Il est prévu également le changement d’horaire (GMT+1) en période estivale. Pour les bâtiments, il est prévu un Code d’efficacité énergétique qui fera l’objet d’une législation spéciale. Pour la réduction de la consommation des produits pétroliers, le plan prévoit l’autoproduction et l’auto-génération, l’utilisation chaque fois que c’est possible des énergies alternatives (éolienne et biomasse). Les transports publics doivent faire l’objet d’une réforme radicale, avec le développement des transports collectifs (Tramways), le contrôle rigoureux des véhicules, le co-voiturage. Pour le gaz butane, il s’agit de cibler les consommateurs pour alléger le poids de la Caisse de Compensation.



La loi sur les énergies renouvelables prévoit une capacité additionnelle à partir des énergies renouvelables de 1500 MW en 2012 et 2200 MW en 2020. L’objectif est de porter la part des énergies renouvelables en 2012 à 18% pour l’électricité, et à 10% du bilan énergétique national. Pour cela, elle a facilité la production d’énergie par les producteurs privés. C’est ainsi que l’énergie éolienne, avec une capacité installée en 2010 de 600 MW couvrira 8% de la consommation totale d’électricité. Quant à l’énergie solaire, un vaste projet a été lancé en Novembre 2009 avec une capacité de 2000 MW et un coût d’investissement 9 milliards de $. Cinq stations solaires sont prévues dans le plan, quatre dans le Sud du Maroc, et une dans l’Oriental. La première station sera mise en œuvre en 2015, et la production totale de 2000 MW équivaut à un million de TEP (Tonne équivalent pétrole), soit une réduction de 3,7 millions de tonnes de CO2 chaque année. Sur le plan institutionnel, et pour suivre l’instauration de l’économie verte dans notre pays, il a été instauré une gouvernance spécifique : Comité national d’orientation au niveau du Premier Ministre, Comité du suivi après du Ministère de l’Energie, Agence marocaine pour l’énergie solaire, et Agence pour le développement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique, qui remplacera le CDER (Centre de développement des énergies renouvelables).



En conclusion, l’instauration d’une économie verte est incontournable pour le Maroc, tant pour des raisons économiques (pénurie de produits pétroliers et de gaz) que pour des raisons écologiques (réduction des nuisances suite au changement climatique). Cependant, cette transformation de l’économie marocaine nécessitera beaucoup d’efforts, à la fois des pouvoirs publics qui doivent l’accompagner d’un cadre juridique contraignant, que du secteur privé marocain qui doit prendra conscience de sa nécessité, que du simple citoyen marocain qui doit modifier son comportement en conséquence. Les médias ont également un rôle primordial à jouer dans ce vaste projet d’avenir.



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